Un capitalisme en mutation

Les faiblesses du capitalisme révélées par la crise économique mondiale ont fait de la critique du néolibéralisme un sujet à la mode. La critique a pris une telle ampleur que certains prophétisent l’effondrement du système. Pourtant, certains facteurs laissent croire que nous sommes peut-être à l’aube d’une nouvelle révolution technologique et économique. Loin de s’effondrer, le capitalisme est peut-être tout simplement en mutation.

Les économistes et les analystes tentent de faire des prévisions de croissance sur des décennies entières, alors que le monde du commerce change à une vitesse fulgurante. On assiste au début de la fin des journaux papier, le cybercommerce continue sa croissance malgré la crise et le téléchargement de musique et de vidéos à faible coût continue de gagner en popularité. Les analyses sont pessimistes, car elles ne tiennent pas compte des avancées technologiques à venir. Il ne faut pas tomber dans l’idéalisation d’un futur rapproché, mais certaines avancées risquent d’avoir des répercussions majeures. On peut penser au laser du NIF (National Ignition Facility) en Californie, qui débutera ses premiers essais de fusion nucléaire l’année prochaine. Plusieurs chercheurs estiment que la fusion nucléaire (en opposition avec la fission atomique) pourra produire un jour une forme d’énergie inépuisable et sécurisée.

L’exploitation de la fusion nucléaire n’est peut-être pas pour demain, mais avec la mondialisation et la multiplication des multinationales, les technologies se répandent à un rythme accéléré et deviennent de plus en plus accessibles. L’intégration vers le domaine civil de technologies jusqu’alors réservées aux grandes agences nationales comme la NASA s’accélère. Des pas de géant risquent d’être franchis rapidement. Par exemple, le tourisme spatial, accessible uniquement à un petit groupe de multimillionnaires, est en voie de devenir «abordable». Richard Branson, l’excentrique PDG de Virgin, projette d’envoyer des touristes dans l’espace pour 200 000 $ d’ici 2011 par le biais de sa fillière Virgin Galactic. Bien que cette somme reste considérable, elle représente un coût 100 fois moindre que celui demandé par la NASA.

Les nouvelles technologies et l’accumulation de richesses contribueront à renforcer le système actuel, car l’augmentation du niveau de vie des nations où le capitalisme est bien enraciné est constant. Avec 120 G$ de plus cette année dans les budgets de recherche, la nouvelle administration Obama a compris que l’avenir passe par un renouveau technologique. Jamais l’administration américaine n’a autant investi en sciences et technologies qu’en 2009. Une conscience de la réglementation, notamment dans les domaines financier et environnemental, s’installe parallèlement à un désir de prendre l’avenir économique en main.

Une grande partie du monde ne profite pourtant pas des nouvelles richesses. On voit apparaître les cellulaires et les ordinateurs portables dans les pays les plus pauvres du monde, mais la majorité de ces populations continue d’être privée d’une qualité de vie décente. Même dans les sociétés riches, la pauvreté persiste. Ces problématiques sont réelles et il est légitime de les dénoncer, mais cela ne constitue pas des éléments de déstabilisation du capitalisme suffisamment forts pour causer sa perte. Les populations privées des merveilles de la modernité ne disposent pas de leviers suffisants pour influencer les grandes puissances.

Le système change et continuera à changer, poussé par l’explosion des technologies. Il est de la responsabilité des gouvernements de faire en sorte que cela se produise humainement. Le système financier a été ébranlé, un nouveau choc pétrolier est à prévoir et les pénuries alimentaires persistent. Pourtant, rien ne laisse présager un effondrement de la propriété privée.
 

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