Depuis quelques années, plusieurs pays du monde choisissent des politiques d’austérité pour pallier à leur( s ) problème( s ) économique( s ). En Europe comme en Amérique, ces politiques ne sont pas sans heurts vis-à-vis les communautés concernées.

L’austérité budgétaire : bonne ou mauvaise idée ?

Depuis quelques années, plusieurs pays du monde choisissent des politiques d’austérité pour pallier à leur( s ) problème( s ) économique( s ). En Europe comme en Amérique, ces politiques ne sont pas sans heurts vis-à-vis les communautés concernées. Est-ce que l’austérité est une bonne idée permettant de rééquilibrer les finances d’un pays ou est-ce une mauvaise idée qui ne fait que creuser encore plus un fossé entre les classes sociales ? Pour commencer, il est important de définir ce qu’est l’austérité.

Jérôme Boucher
Chef de pupitre en actualités
@JeromeLBoucher 

Tout d’abord utilisée par l’ancien premier ministre français Raymond Barre pour expliquer sa politique anti-inflationniste de la fin des années ‘80, la notion d’austérité est tantôt décrite par la droite économique comme une hausse d’impôt, tantôt par la gauche comme une réduction et un plafonnement des dépenses publiques. En réalité, c’est souvent un peu des deux, tout ça dans le but d’en arriver à un équilibre budgétaire, c’est-à-dire que les revenus d’un État sont égaux aux dépenses de celui-ci.

Ce qu’en pensent les économistes

Pour plusieurs économistes, en période de crise, augmenter les tarifs ( ou les impôts ) tout en diminuant les dépenses, ce n’est pas très rusé. Augmenter les tarifs diminue grandement le pouvoir d’achat de plusieurs citoyens, surtout pour les moins nantis. Sans pouvoir d’achat digne de ce nom, les citoyens dépensent peu ou pas, ce qui fait stagner l’économie globale d’une société. Qui plus est, couper les dépenses, surtout en matière d’avantages sociaux, diminue la qualité de vie des citoyens qui sont plus à risque d’avoir des problèmes de santé ou d’être incapables de payer les tarifs qui leur sont demandés. L’économie d’un pays devient alors concentrée autour de quelques secteurs sûrs, ce qui diminue la diversité du portefeuille étatique et le rend plus à risque par rapport aux soubresauts de la bourse mondiale. Bien entendu, cette avenue se fait généralement au détriment des personnes les moins fortunées qui sont moins aptes à vivre avec les défauts de l’austérité.

Pour l’économiste américain récipiendaire du Prix Nobel 2001 d’économie, Joseph Stiglitz, tout cela ne fait qu’aggraver le problème des inégalités. « On ne parle pas seulement des inégalités de revenus, mais aussi de l’inégalité des chances d’améliorer son sort par son travail et son talent : le grand mythe au coeur du rêve américain ».

Trois moyens de passer à travers une crise

Reste que malgré ces doléances, la rigueur économique demeure un facteur essentiel pour l’essor d’une société, puisqu’en période d’incertitude économique, les revenus étatiques se voient grandement diminués. Il faut donc pallier à ce manque à gagner tout en gardant la qualité de vie louable. Trois réponses à ce problème sont alors possibles.

1- Ne pas se soucier du déficit, et considérer la relance comme prioritaire ; il sera toujours temps de s’occuper des déséquilibres budgétaires. C’est souvent ce qu’on appelle « l’autre politique » deux mots qu’on prononce avec la même émotion que « grand saut dans le vide ». En clair, c’est très risqué comme approche.

2- Se fixer un cap chiffré de réduction du déficit et ne pas en déroger même quand l’économie ralentit. Augmenter les impôts ( et/ou les tarifs ) ou réduire les dépenses reste donc prioritaire. Et si l’économie flanche, on accroît l’effort pour parvenir à l’objectif. C’est, en somme, une politique d’austérité. Et cette austérité est d’autant plus douloureuse que, par ailleurs, la politique monétaire n’est pas très fougueuse. Comme démontré plus haut, ce n’est pas une option que l’on pourrait qualifier de rusée. C’est un peu comme si on vous suggérait de démissionner de votre emploi pour économiser sur l’essence nécessaire pour vous rendre au travail. En clair, c’est une économie directe qui touche de plein fouet les bénéfices directs et indirects.

3- Ne se concentrer que sur la réduction du « déficit structurel » : celui qui n’est pas lié à la conjoncture. Ne pas se soucier du déficit conjoncturel. Si la croissance ralentit, on ne cherche donc pas à « compenser » les baisses de recettes ou les hausses de dépenses. On laisse jouer les stabilisateurs automatiques. C’est une politique budgétaire neutre qui exige beaucoup plus d’action sur le maniement des finances publiques, mais elle demeure la moins dommageable à court, moyen et long terme.

Au Québec

Ici, il semble que le gouvernement Marois a choisi la deuxième option en faisant payer les citoyens pour le marasme économique actuel. Les coups de sabre dans les dépenses publiques sont marqués et diminueront forcément les revenus de l’État qui ne sont déjà pas très élevés en ce moment.

Les chômeurs et les prestataires d’aide sociale y goûtent aussi, et ce fortement. Les coupes dans l’aide sociale s’inscrivent dans le cadre du budget déposé par le PQ le 20 novembre dernier, qui a poursuivi la politique socio-économique du gouvernement libéral précédent de Jean Charest en maintenant la taxe santé et les baisses d’impôt pour les riches, tout en limitant drastiquement les dépenses sociales. Ce sont des pans entiers des services publics qui sont maintenant dans la ligne de mire du gouvernement péquiste. C’est sans parler du système de santé, de l’éducation et du réseau des garderies qui y goûtent fortement. Et sans investissements dignes de ce nom, le Québec connaîtra forcément des pertes d’emploi reliées aux dépenses trop retenues du gouvernement.

On peut donc se poser la même question que le journaliste économique de Radio-Canada, M. Gérald Fillion : comment peut-on augmenter les taxes et les impôts, et miser sur l’austérité, quand la récession s’étend dans plusieurs endroits dans le monde et que les niveaux de chômage sont si élevés ?

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