Le choc du retour

«Le choc du retour est semblable à une peine d’amour, métaphorise Marcel Bernier. Même en sachant l’épreuve qui nous attend, une période d’adaptation est inévitable», affirme le psychologue du Centre d’aide aux étudiants (CAE). En effet, le clivage entre les sociétés capitalistes et celles qualifiés de «collectivistes» peut induire chez le voyageur un grand nombre de remises en question.

Les différentes étapes du retour sont classées en quatre stades. Le premier d’entre eux, la «préparation», débute une semaine ou deux avant l’arrivée à l’aéroport. Tout se bouscule, les derniers adieux, les dernières expériences… L’arrivée est souvent perçue d’une façon très positive.

Suit ensuite la «lune de miel». Les semaines suivant le retour ressemblent fortement à l’image formée lors de la préparation. Selon Marcel Bernier, «c'est une période euphorique. D'un endroit à l'autre, vous êtes le centre d'attention, une sorte de visiteur-vedette.» Les responsabilités découlant de la vie quotidienne ne reposent pas encore sur les épaules du voyageur. Celui-ci ne perçoit pas les modifications qui ont pu avoir lieu dans son entourage ou en lui-même.

Le «choc du retour» se distingue comme étant l’étape la plus laborieuse. Ce syndrome, qui s’apparente beaucoup au mal du pays, engendre certaines pensées systématiques. «On exagère certains problèmes et on en méprise d’autres, décrit Marcel Bernier. On a tendance à émettre des jugements envers son entourage.»

Une marginalisation s’installe, accompagnée d’une résistance à l’adaptation, car le voyageur ne désire pas s’intégrer dans cette société où il ne se reconnaît plus. «J'ai vraiment trouvé difficile de ravoir une vie organisée, où je devais suivre un horaire», explique Gaël Martin, qui a voyagé à travers l'Iran, la Chine, la Turquie et l'Inde pendant trois mois.

Parfois, fatiguées de se faire demander comment a été le voyage, certains préfèrent s'isoler pour garder leurs souvenirs ou deviennent tannées de se faire dire qu'ils sont chanceux. «C'est comme la voile, tout le monde en rêve, jusqu’à ce qu'ils se rende compte que ce n'est pas seulement une partie de plaisir, voyager, affirme Gaël Martin. C'est un choix de vie, de priorité.»

Pour passer à la quatrième étape, la «réintégration», le CAE suggère plusieurs pistes de solutions. Cet organisme offre d’ailleurs plusieurs services aux étudiants qui en éprouvent le besoin, telles des conférences ou des rencontres individuelles.

Prévoir le choc permet de le réduire. Ainsi, un voyageur expérimenté souffrira moins que lors d’une première expérience. L’attente est un élément essentiel du rétablissement, au même titre que la création de projets. De plus, éviter de revenir sans le sous permet une réadaptation plus rapide. Il est aussi suggéré de revoir la région comme le ferait un touriste. Le voyageur devra aussi apprendre à se définir autrement et découvrir comment s’épanouir à l’endroit où il se trouve.

Marcel Bernier rappelle que «l’aventure n’est pas un endroit, mais un moment.»

Consulter le magazine