Regard sur l’importance des évaluations de professeurs trimestrielles

Les évaluations de cours sont-elles un leurre?

Depuis ses débuts, en 1997, la Politique d’encadrement de l’évaluation des activités d’enseignement par les étudiants aux trois cycles a permis à de nombreux étudiants de s’exprimer sur la qualité des cours et de l’enseignement dont ils bénéficient, particulièrement grâce aux évaluations dites sommatives qui sont sous la responsabilité des diverses facultés de l’Université Laval. Cela signifie que toutes les évaluations ne sont ni menées à la même fréquence, ni selon les mêmes modalités à travers tout le campus.

Toutefois, une règle bien claire s’applique à toutes les évaluations sommatives d’activités pédagogiques : il est impératif qu’au moins 60 pourcent des étudiants inscrits à un cours complètent le questionnaire, sans quoi les résultats ne sont pas considérés comme significatifs. En-deçà de ce seuil minimal, bien que les résultats et les commentaires écrits des étudiants soient tout de même transmis au professeur, ils ne sont ni compilés, ni sauvegardés dans le dossier du professeur, d’où l’importance pour les étudiants de se faire un devoir de prendre part aux évaluations sommatives.

Lorsqu’ils sont considérés comme significatifs, les résultats des évaluations peuvent, selon plusieurs, avoir des impacts majeurs sur la carrière d’un enseignant à l’Université Laval, notamment en ce qui a trait aux possibilités d’avancement. Louis Imbeau, directeur par intérim du département de science politique, indique à titre d’exemple que de mauvaises évaluations peuvent être à la base d’un refus de promotion, ce qui s’est déjà produit au département de sciences politique, selon ses dires.

Luc Lebel, directeur du programme coopératif en opérations forestières, va dans le même sens, affirmant qu’il a déjà été témoin de conséquences sérieuses sur la carrière de certains enseignants. «Des chargés de cours ont déjà été retirés suite à de mauvaises évaluations au département de foresterie», dit-il. Même son de cloche du côté d’Alain Faucher, adjoint du vice-recteur aux études et aux activités internationales, qui estime que les résultats des évaluations peuvent avoir des conséquences importantes sur l’agrégation et la titularisation des futurs professeurs.

Il semblerait toutefois que les chargés de cours soient beaucoup plus vulnérables aux conséquences potentielles des évaluations sur leur carrière que les professeurs permanents. Éva Falk-Pedersen, secrétaire aux affaires pédagogiques de l’AEESPUL, estime en effet que « le problème essentiel avec les évaluations de cours, c’est l’ingérence et la souveraineté des professeurs ». Une idée soutenue par Paul-Antoine Cardin, vice-président à l’enseignement et à la recherche à la CADEUL: «Un directeur de département peut passer autant de messages qu’il le veut à un professeur agrégé [suite à une évaluation majoritairement négative], ça revient au professeur quand même.»

Cependant, M. Cardin souligne l’importance pour les étudiants de prendre le temps de répondre aux questionnaires et d’écrire leurs commentaires : «C’est un cercle vicieux. Plus les étudiants vont répondre, plus on va avoir de poids.» Selon lui, les évaluations, bien qu’elles doivent être constructives, permettent d’envoyer un message clair.

Guillaume Forest-Allard, coordonnateur général de l’AEESPUL, croit d’ailleurs que la plupart des professeurs se soucient des évaluations qui leur sont transmises et que cela leur permet d’ajuster leurs cours, des propos confirmés par M. Imbeau : «Les professeurs sont très sensibles aux évaluations qu’ils reçoivent. Aucun prof n’aime l’insatisfaction», indique-t-il.

Louis Massicotte, professeur du département de science politique, se décrit d’emblée comme un grand partisan de ces évaluations. «Au début de chaque trimestre, je regarde les évaluations et j’essaie de voir ce qui peut être amélioré», dit-il. Gérard Leclerc, chargé d’enseignement au département d’information et de communication, abonde dans le même sens : «Je trouve ça agréable d’être évalué et renouvelé chaque année, parce que ça me pousse à me dépasser.»

M. Leclerc estime cependant que la nature du cours peut souvent influencer la perception que les étudiants en ont, citant en exemple les commentaires très contrastés qu’il reçoit pour son cours portant sur les médias québécois et ceux que lui mérite son cours de méthodologie. Il lui faut donc décanter par rapport aux résultats et commentaires qu’il reçoit, puis pondérer les extrêmes.
Notons toutefois que l’actuelle politique d’évaluation des activités d’enseignement en est peut être à ses derniers miles. En effet, le Bureau des services pédagogiques de l’Université Laval dirige actuellement le processus pouvant mener à l’adoption, par le Conseil universitaire, d’une nouvelle politique d’ici la fin de la présente session d’hiver. M. Cardin soutient que la CADEUL cherche à s’assurer que la nouvelle politique, qui s’annonce plus nuancée, offrira tout de même une bonne structure pour la fréquence, mais surtout pour le suivi des évaluations sommatives.

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