Le grand bashung s’éteint à Paris

Le chanteur, poète et comédien Alain Bashung est passé de vie à trépas samedi le 14 mars 2009, à Paris, à l’âge de 61 ans, des suites d’un cancer du poumon, malgré de multiples traitements de chimiothérapie. Il fut incontestablement l’un des artistes les plus fascinants de son époque. Il faisait partie de ces artistes modestes et complets, qui ne cherchent ni la célébrité ni l’adoration. Demeurant fidèle à lui-même, faisant fi des critiques et des commérages, il a su diriger une carrière qui restera l’une des plus atypiques et inclassables du paysage rock français. Son répertoire original et audacieux, qui comporte 19 albums (studio et live), demeure un héritage ignifuge pour les générations à venir. Il laisse sans équivoque derrière lui un legs aussi important pour la francophonie que celui de Serge Gainsbourg.

Il venait tout récemment d’être anobli de la plus haute décoration honorifique que l’on peut décerner à quelqu’un en France, c’est-à-dire Chevalier de la Légion d’honneur. Durant le concours des Victoires de la Musique du mois dernier, il a raflé les plus prestigieux prix dont l’interprète masculin de l’année, l’album de l’année, pour Bleu Pétrole ainsi que la tournée de l’année. Un exploit surhumain si l’on considère qu’il était affligé d’une maladie mortelle. Certes, on peut certainement dire que sa musique sur Bleu Pétrole demeure très moderne, voire encore une fois en avance sur son temps.

Depuis ses débuts en 1977, Alain Bashung vivait sa vie comme peu le font. Une vie trépidante, jubilatoire, sombre, énigmatique et engagée. Il était devenu le symbole ultime de toutes les générations dans le domaine du rock français et de la chanson, à l’instar de Renaud et de Bernard Lavilliers. Alain Bashung avait cette voix reconnaissable à mille lieux à la ronde avec son timbre si sulfureux et nasillard qu’il vous transperce l’intérieur d’un seul refrain. Il fut un chanteur à textes, un poète dans l’âme, dans la trempe de Dylan ou de Cohen. Que l’on aime ou pas Bashung, on ne peut nier la qualité de son travail artistique en studio lorsqu’on écoute «Gaby Oh Gaby», «Osez Joséphine», «Ma petite entreprise» ou «La nuit je mens». Ses chansons ont ce «je ne sais quoi» qui vous aspire d’un trait dans un univers fantastique sans crier gare, sans même attendre le premier frisson.

Les musiques de Bashung transcendent inévitablement le rock pour se métisser dans une pléthore de styles tels que le folk, le new-age, le blues, l’électronique, le country et bien d’autres. Cet homme éclectique et indémodable carburait non pas au pétrole mais à l’eau de vie. Malgré son épuisement, Bashung aura continué de s’offrir en entier à son public, qui se compte désormais en million à travers le monde.

Voici donc pour terminer un petit guide d’achats simplifié regroupant quelques albums indispensables à posséder dans sa discographie : Roulette Russe (1980), Osez Joséphine (1991), Chatterton (1994), Fantaisie Militaire (1998) et, bien sûr, Bleu Pétrole (2008), auquel Gaëtan Roussel, le grand manitou de Louise Attaque, a collaboré à l’écriture.

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