L'événement Émergences chorégraphiques, six danses créées par des chorégraphes et danseurs émergents, avait lieu du 6 au 10 décembre

Danses d'aujourd'hui

La première pièce, signée Jean-François Duke, présentait, dans la lumière d'un projecteur horizontal, deux femmes presque identiques. Les danseuses se regardaient, s'imitaient, se doublaient, dans un silence entrecoupé d'un bruit lancinant faisant penser aux roulettes d'un casino. Elles semblaient courir après l'évanescent… et un public plutôt froid.

Un autre duo féminin a cueilli plus facilement l'émotion dans une chorégraphie d'Andrée-Anne Giasson. Cycles a commencé au son d'un jet d'eau qui, marié à des mouvements rapides et évocateurs, a fait un clin d'oeil à l'obsession du propre, du pur. Par souci de préserver cette pureté, le contact entre les deux danseuses est incertain. Elles se touchent, s'enlacent pour se repousser aussitôt. Dans des jeux de miroirs et de répétitions, Andrée-Anne Giasson et Marie-Michèle Gagnon-Tessier étaient gracieuses, touchantes, fragiles.  

La Montréalaise Jade Marquis, elle, questionnait les limites de la séduction dans un solo impressionnant, entre le silence et « Rainy Day Women » de Bob Dylan. La danseuse et chorégraphe a répèté une même séquence en allant toujours plus loin dans la sensualité, jusqu'à en venir au vulgaire. 

Maryse Damecour, lors d’un duo créée par elle, a pris des poses sur une large chaise au rythme des flashs d'un projecteur de diapositives. S’est joint à elle le seul danseur masculin de la soirée, l'excellent Fabien Piché, sur l'air classique et mélancolique d'un « Stabat Mater ». Les thèmes de la dépendance, de la fragilité et de l'entraide ont surgis des mouvements précis, gracieux et sensibles des deux danseurs.

Dans un montage sonore allant du silence total au disco en passant par le violoncelle, les chants d'oiseaux, la sitar, les gouttes d'eau et la harpe, la danseuse Christine Laguë a progressé en tableaux et passe par différents états. La réaction était mitigée.

Pour ne pas laisser le public « sur sa faim », un trio sous la direction de Caroline Drolet a étalé du maïs soufflé à la grandeur de la scène dans une épopée allant de l'hyperactivité sur fond de beat martelant au calme d'un violon et d'un piano derrière lequel planait la surconsommation.

Est-ce que la danse aura réussi à « démontrer qu'on a le pouvoir, par nos gestes, de transformer des comportements générationnels en passages oubliés », comme semblait le promettre le texte du programme ? Cela reste à prouver. Mais le talent et la volonté, eux, étaient bien présents.

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