Kitchen Chicken – Poulet, clopes et bas de nylon

Du 6 au 17 décembre inclusivement, le Périscope présente Kitchen Chicken, « chronique de cuisine [dans laquelle] les chansons des Cackle Sisters, reines du yodel américain des années trente, se mesurent aux fourneaux d’un improbable repas. » J’ai pu, vendredi dernier, assister à l’une des représentations, ayant décidé de m’y plonger sans aucune attente, si ce n’est celle que de prendre une pause de la session qui, depuis quelque temps, m’avale tout rond. Pari réussi. Au fil des prouesses, du désordre et du festin, la musique du folklore américain, le poulet, les clopes et les bas de nylon m’auront, le temps d’une-heure-et-quart-sans-entracte, rendu une forme de réconfort.

Par Frédérik Dompierre-Beaulieu (elle), Cheffe de pupitre aux arts

Idéation et création : L’orchestre d’hommes-orchestres | Distribution : Bruno Bouchard, Gabrielle Bouthillier, Jasmin Cloutier, Simon Elmaleh, Philippe Lessard-Droler et Danya Ortmann | Conception sonore : Frédéric Auger | Conception lumières : Philippe Lessard-Drolet | Musique : DeZurik Sisters, Jimmy Rodgers, Coon Creen Girls et L’orchestre d’hommes-orchestres | Scénographie : L’orchestre d’hommes-orchestres

 

En réservant nos billets, à Math et moi, ma curiosité avait tout de suite été piquée par la rencontre entre la musique, le yodel et la cuisine que nous promettait la proposition. Des artistes qui performent et qui cuisinent en live. Cool. Audacieux, surtout. Mais pour être honnête, c’est principalement parce que ça ne sentait ni les dystopies réchauffées, ni les lignes de comm ou les histoires qui me font remettre toute mon existence en question que j’avais envie d’y assister…et aussi parce qu’il était temps que je ponde un article…et pour la musique et la cuisine, promis.

Quelque chose de léger, donc. Et c’est un peu ça, Kitchen Chicken. C’était très feel-good. Par son rapport à la filiation, à la transmission et au patrimoine, d’une part, et, pour reprendre les mots de François Jardon-Gomez dans Le Devoir, sa capacité à raconter « le quotidien et le populaire », d’autre part. Au-delà d’une simple mise en scène ou esthétique rétro, c’est sur l’immersion et l’inattendu que misent les divers numéros, qui réussissent tous à nous transporter dans leur univers. Alors que les artistes, sur un ton humoristique, enchaînent habillement les manœuvres culinaires au fil des pièces musicales, c’est principalement les parfums qui envahissent la salle et le contact avec les spectateur.rices – sans vouloir divulgâcher – qui enrichissent l’expérience et contribuent à l’émergence du sentiment de proximité, ou de familiarité, même. S’installe également devant nous, en cuisine, un chaos qui, sans la part de risque qu’il sous-tend, ne serait que de l’ordre de la chorégraphie ou de la technique, pacte que toustes semblent accepter d’emblée. Ce désordre témoigne cependant d’une forme de lâcher-prise que l’on s’interdit plus souvent qu’autrement avec la nourriture : outre la question du gaspillage alimentaire, la proposition est ingénieuse et originale. Rien n’est inutile ou laissé au hasard, et cette volonté de maximiser l’espace et l’utilisation des instruments et accessoires m’a plu, l’effet de surprise participant à la légèreté et la créativité de la représentation. En ces journées froides et écourtées, je recommande fortement d’aller vous y réchauffer, vous aussi, le temps d’une soirée.

Crédits photos : Charles-Frédérick Ouellet

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