L'accélérateur de particules au Festival du Jamais Lu

La soirée a commencé en force avec un texte d'Édith Patenaude, Le monde sera différent, qui nous a étourdis de manière plaisante par ses mises en abîme, ses effets de distanciation, ses appels et rappels constants aux spectateurs. Lue avec conviction et maîtrise par Édith Patenaude elle-même et Jocelyn Pelletier, la pièce promet d'user de tous les moyens possibles pour que le monde cesse d'être « indifférent ».

Tout autre chose nous attendait avec Slush d'Érika Soucy, très ancrée dans le concret. Lue et interprétée de façon déjà convaincante par cinq comédiens, la pièce traite, entre autres, de la famille, des rêves prisonniers d'un relais de ski-doo et de cette confrontation toujours amusante entre ville et campagne.

A suivi une adaptation contemporaine du Britannicus de Racine, Frères : la beauté et le sang de Steve Gagnon, aux mots et aux images puissants. Les cinq comédiens ne lisaient pas, ou si peu. Ils incarnaient déjà leur personnage, en particulier l'interprète de Néron, le frère jaloux de Britannicus, qui nous en a mis plein la vue et les oreilles. Ça promet!

Plus léger, mais tout aussi pertinent, Le dos de la jaquette, de Joëlle Bond, met en scène une étudiante à la maîtrise en littérature qui, travaillant au casse-croûte familial, s'est laissée aller à lire des biographies et rêve, depuis, d'une vie extraordinaire. Le texte, rempli de références qui n'obstruent pas la compréhension, est criant de vérité.

Le dernier, mais non le moindre, Les racines au fond de ma gorge, est fidèle à son auteur, Jocelyn Pelletier. Sur la scène, Pelletier était seul devant une caméra. Sur l'écran situé derrière lui, il nous regardait droit dans les yeux. Comme à son habitude, le texte est exigeant, dense, littéraire. C'est un poème qui gagnerait peut-être plus à être lu. Malgré tout, les thèmes touchant au nazisme – loi du plus fort, race pure, violence – étaient transmis avec intensité.

Il semblait que les textes ressortaient mieux dans la quasi-absence de mise en scène : il n’y avait que des comédiens et leur voix pour projeter les mots percutants d'auteurs dont on n'a pas fini d'entendre parler.

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