Perreau danse autrement

C’est devant un Théâtre Petit Champlain conquis d’avance que Yann Perreau a présenté sa version «tournée» d’À genoux dans le désir le 16 février dernier. L’album paru en octobre 2012 est composé de textes du poète Claude Péloquin et des pièces de cet opus, ainsi que des précédents (Un serpent sous les fleurs, Western Romance).

Justine Pomerleau-Turcotte

UNE-Yann-Perreau---Guylaine-Jacob-3Rencontré dans sa loge un peu avant le début de la prestation, l’artiste dégage un calme bardé d’enthousiasme. Plus qu’une simple collaboration artistique, le tandem créateur Péloquin-Perreau est basé sur une amitié et une confiance mutuelles qui transparaissent. «J’avais carte blanche», affirme l’interprète. «C’est rare qu’un auteur donne autant de liberté». Probablement parce qu’il a senti que Yann Perreau avait bien fait ses devoirs : il a su s’approprier les textes sans les dénaturer, en dénotant une compréhension profonde de la pensée du poète.

N’eût été la présence à la mezzanine d’un voisin bruyant dont la place rêvée aurait été sur une scène — mais pas celle-là, de grâce! —, la soirée aurait été magique. Malheureusement, cet irritant était suffisant pour détourner l’attention de la véritable fête musicale qui se déployait devant nous. En première partie, Sarah Bourdon, armée de sa guitare et de sa voix tour à tour cristalline et un brin rocailleuse, a installé le public dans une ambiance romantique avec ses œuvres folk intimes, simples et touchantes. Elle s’est par la suite jointe au trio complice de Perreau, complété également par le musicien polyvalent Jean-Alexandre Beaudoin.

L’instrumentation touffue de l’album devait passer par une cure d’amaigrissement pour pouvoir trimballer plus facilement les chansons. Mais c’est parfois en dépouillant une pièce qu’on s’approche le plus de son âme, de son essence… L’enrobage réussit à se faire parfois plus dense, même avec un effectif réduit. Plus tôt dans la soirée, Yann Perreau confiait : « … des fois, on pousse plus. On est trois, mais des fois, tu fermes les yeux et t’as l’impression qu’on est douze ! » Promesse tenue. Les musiciens, solides, livrent une performance toute en nuances, solide, affirmée. Du funk chaud de La goutte à l’intimité de Le bonheur est à côté, pas de l’autre côté en passant par l’énergie rythmée de Les temps sont au galop, ils passent d’un rôle à l’autre avec aisance tout en transmettant un réel bonheur de jouer.

La mise en scène est également fort réussie: ainsi, le piano se transforme en bar le temps d’un voyage à Marseille, et un panneau à l’arrière est propice à des projections créatives et à du théâtre d’ombre hypnotisant.

Bref: un artiste au sommet de sa forme et de son art, une soirée réussie, et une tournée prometteuse.

Quoi? À genoux dans le désir
Qui ? Yann Perreau
Où ? Théâtre Petit Champlain
Quand? En supplémentaire le 11 avril 2013

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