Réjouissances et questionnements au sujet de La Ruche UL

La nouvelle a de quoi réjouir ! En s’amenant sur le campus, La Ruche favorise la réalisation de projets, ce que saluent plusieurs étudiants. Une semaine après l’annonce, un léger flou demeure toutefois sur les répercussions que le partenariat aura sur la vie du campus et sur le financement des initiatives.

L’alliance semblait naturelle entre La Ruche et les étudiants. Depuis son lancement en 2013, une vingtaine de leurs initiatives ont été financées par la plateforme, soit le quart de tous les projets couronnés de succès, estime son cofondateur Jean-Sébastien Noël.

Une bonne nouvelle que saluent plusieurs étudiants impliqués du campus, dont Émile Beauchemin. Le cofondateur du Festival de théâtre de l’Université Laval se réjouit de ce partenariat, puisque « les activités étudiantes sont toujours en recherche de financement. C’est le fun que l’Université contribue à ça et qu’elle réalise que c’est un besoin que les étudiants ont. »

La branche lavalloise de La Ruche séduit tout autant les jeunes improvisateurs qui « ne vivent sur pas grand-chose », laisse entendre la présidente de la Ligue d’Improvisation Dangereuse de l’Université Laval (LIDUL), Mary-Maude Fournier. Pour la jeune femme, « c’est une occasion de plus pour aller se chercher du financement à l’Université », surtout que « du côté culturel, c’est difficile d’avoir des sous ».

Le fait que la Fondation assume ces frais « annule le seul et unique point négatif du sociofinancement avec La Ruche » — Francis Lacelle du SPOT

Coup de pouce

En vertu de cette entente, la Fondation de l’Université Laval paie les frais administratifs de La Ruche, une somme qui représente 7 % des sommes recueillies et qui sert à assurer son fonctionnement.

Reverser une partie des fonds amassés a été le principal pépin auquel l’équipe de la Sympathique Place Ouverte à Tous (SPOT) a été confrontée, se rappelle Francis Lacelle, finissant à la maîtrise en architecture. Le fait que la Fondation assume ces frais « annule le seul et unique point négatif du sociofinancement avec La Ruche ».

Le volet mentorat UL du partenariat enchante tout autant. Bénéficier des conseils d’un membre de la communauté universitaire en plus des mentors de La Ruche permettra un meilleur encadrement des projets, estime Mary-Maude Fournier. Même son de cloche chez Émile Beauchemin qui trouve positif que les projets aient un mentor « à l’interne qui soit familier avec la façon de procéder » et avec « la bureaucratie ulavalloise parfois compliquée à naviguer ».

Plus de projets ?

En ouvrant ses portes de façon officielle à la communauté universitaire, La Ruche recevra-t-elle un déluge de propositions ?

D’aucuns sont confiants que la collaboration entre la plateforme bourdonnante et l’Université fera naître plus de projets. Ceux qui peuvent être rebutés par le manque de subventions y trouveront leur compte, croit le joueur d’improvisation Alexis Thériault-Laliberté, convaincu « qu’on va voir une multiplication de projets universitaires ».

Un avis que partage Geneviève Champoux, directrice du Bureau de la vie étudiante (BVE). L’entité, qui chapeaute des dizaines d’initiatives par année, mettra cette possibilité de financement de l’avant pour les étudiants désireux se lancer dans une nouvelle idée, ajoute Mme Champoux.

Pour d’autres, comme Émile Beauchemin, La Ruche-UL sera davantage un facilitant pour les projets existants qu’un « catalyseur ». L’argent est fondamental dans la réalisation de toute initiative, mais reste que « ça prend des gens pour créer des projets, et ce n’est pas parce qu’il y a plus d’outils qu’il y a plus de personnes pour les réaliser ».

Visibilité accrue

Plus qu’une option de financement, le partenariat offre une visibilité accrue aux initiatives lavalloise, voire une « passerelle un peu plus officielle entre l’Université et le monde des affaires », énonce Jean-Sébastien Noël.

Chaque année, des étudiants de tous horizons proposent festivals, concerts, pièces de théâtre et autres évènements qui jouissent d’une attention médiatique très variable, voire inexistante dans certains cas. Ce pont est par conséquent nécessaire, d’autant plus que pour Émile Beauchemin, la promotion d’évènements universitaires par l’Université « ne favorise pas leur rayonnement extérieur ». Selon l’étudiant en théâtre, mettre pied dans La Ruche permettra aux « activités étudiantes de sortir des murs du campus » et de recevoir plus d’attention de la part du grand public.

L’alliance conclue la semaine dernière sera peut-être aussi à l’origine d’une plus grande communication entre les projets étudiants, espère Francis Lacelle. Celui qui s’est activé derrière le SPOT l’an dernier se rappelle avoir eu besoin de chercher des compétences à l’externe pour mettre l’idée à terme. À l’opposé, lors de la participation de son équipe à Entrepreneuriat Laval, il a été surpris du grand nombre de projets qui auraient pu bénéficier de l’expertise d’étudiants en architecture.

Éric Robitaille, président des Treize, redoute quant à lui que l’UL « se décharge de sa responsabilité financière en regard aux projets étudiants aux dépens du financement social ».

Moins de financement traditionnel ?

Les compressions dont l’institution fait les frais depuis l’an dernier ont fait fondre, voire disparaître nombre de subventions accordées d’ordinaire à la population estudiantine. La question se pose donc : si l’institution mise sur le sociofinancement – auquel elle contribue financière à hauteur de 5 % à 10 % – donnera-t-elle moins de sous aux étudiants qui ont des idées plein la tête ?

Éric Robitaille, président de la troupe des Treize, redoute quant à lui que l’UL « se décharge de sa responsabilité financière en regard aux projets étudiants au dépens de ce financement social ». Idem pour Thomas Rodrigue, jeune réalisateur étudiant qui a sociofinancé son dernier film, pour qui la plateforme doit être « complémentaire à ce qui existe déjà, et non un substitut ».

Tous ne partagent pas cette appréhension, mais croient plutôt que l’Université soit en mode solution. Francis Lacelle est de ceux-là, confiant que l’institution « a encore le désir que ses étudiants lancent des projets, mais qu’elle n’a plus nécessairement les moyens ».

Questionnée en ce sens, la directrice du BVE prend le parti de ces derniers en affirmant que c’est « une corde de plus à notre arc », et non une stratégie pour réduire le financement.

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