On aurait tort de réduire la marionnette à sa fonction de divertissement pour jeunes enfants. Des étudiants du baccalauréat en théâtre le prouvent avec la cr&e

Un art théâtral méconnu

Créée dans le cadre du cours optionnel, mais fortement suggéré par ses participants « Projet Marionnettes », cette pièce, écrite par l’enseignante Denyse Noreau, nous plonge dans le mythe égyptien de la création du monde. Un sujet inusité en 2012, et pourtant d’actualité : « Il y a des parallèles à faire entre cette époque et la nôtre » croit Claudelle Houde-Labrecque, une des participantes du projet, principale responsable de la scénographie. Émilie Rioux, en charge de la production publicitaire, abonde en ce sens : « L’Égypte est une des civilisations fondatrices de l’Occident, et il y a plusieurs de nos mythes contemporains qui relèvent des Égyptiens. Ce qu’on a appris dans ce projet, c’est qu’on a rien inventé. »

Encore fallait-il traiter cette thématique avec originalité ; c’est ici que la marionnette, un élément à la base du cours, entre en jeu. « Il y avait une volonté de prendre au sérieux ce médium, surtout dans un contexte mythologique comme celui-ci, où les moments comiques sont peu nombreux, mais pas inexistants. On voulait donc dépasser le concept de la marionnette à gaine, et utiliser des marionnettes à tiges et d’autres à grandeur humaine, comme Thôt, qui peuvent déjà dégager une émotion sans qu’on ait à les manipuler » raconte Thomas Langlois.  Ce dernier ajoute que « c’est tout un défi de provoquer des émotions chez le spectateur sans qu’il regarde l’acteur derrière la marionnette. » Et Houde-Labrecque de mentionner : « Il ne faut pas être narcissique ! C’est bon pour l’orgueil du comédien ! »

Chacune des marionnettes a pris ainsi une quantité d’heures incalculable à être fabriquée, peinte, séchée, parfois réparée. « Il y a un soin particulier et récurrent à porter à l’objet que tu fabriques » raconte Langlois. C’est en tout cas la polyvalence que l’étudiant a appris avec ce projet : « Sans jouer en tant qu’acteur, il faut que tu saches faire jouer une marionnette en tant qu’acteur. Ce sont deux techniques qui s’emboîtent. » Houde-Labrecque intervient, précise que parfois, une marionnette est manipulée par deux acteurs. « Il faut donc savoir travailler ensemble. C’est plus qu’un travail d’équipe, c’est un travail de symbiose. »

La marionnette ne serait-elle donc qu’un « jouet » ? « En un certain sens, oui » croit Langlois. « C’est un matériau avec lequel tu ne peux pas vraiment conceptualiser. Il faut seulement beaucoup se pratique avec. » Il s’agit donc d’un art à part entière : « Pierre Robitaille, du Théâtre Pupulus Mordicus, me racontait que tu fais véritablement vivre ta marionnette quand tu as ce déclic, celui de transférer tes émotions d’acteur dans un mouvement physique de manipulation » raconte Émilie Rioux, qui déplore le peu de formation au Québec dans le domaine, si ce n’est un DESS à l’UQAM et ce cours optionnel à l’Université Laval : « Ce sont les compagnies de marionnettes elles-mêmes qui donnent des formations aux acteurs pour des pièces précises d’habitude. Ce médium mériterait plus d’attention et de véritable formation. » Voilà déjà une poignée d’étudiants capables d’un tel exploit, riches de ce nouveau savoir théâtral inestimable.

Quoi ? Le voyageur de la nuit
Qui ? Texte : Denyse Noreau, mise en scène : les étudiants et les deux professeurs du cours
Où ? LANTISS (3655 du pavillon Louis-Jacques Casault)
Quand ? Vendredi 13, samedi 14 et dimanche 15 janvier, 20h

Crédit photo : Claudy Rivard

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