La colère est mauvaise conseillère

Depuis quelques jours, il est de bon ton de critiquer le premier ministre du Canada, et plus particulièrement sa politique étrangère. Ce n’est pas que je crois que l’on ne doive pas critiquer le chef de l’exécutif, ou qu’on ne puisse pas avoir de débats sur la politique internationale du pays. Sauf qu’en ce moment, ce n’est pas un débat que nous avons, mais une véritable campagne de pilonnage à laquelle se livrent certains dans nos médias (en attendant l’Irak). Face à tous ces bruits assourdissants, mais surtout abrutissants, je me sens le devoir d’élever ma voix.

La semaine dernière, un attentat au Burkina Faso a fait 29 morts dont 6 Québécois. Il n’en fallait pas plus pour qu’un peuple pacifique qui n’avait voulu participer à aucune des deux guerres mondiales se découvre une nature guerrière. En fait, le mouvement a été lancé par la mère d’une des victimes qui, lors d’un blitz médiatique, a exigé du gouvernement canadien qu’il maintienne sa mission de bombardement contre l’État islamique. Avant d’aller plus loin, rappelons que l’État islamique du Levant se trouve… au Levant, plus précisément en Syrie et en Irak. Rappelons aussi que le Burkina Faso est un pays africain, et qu’il se trouve par conséquent… en Afrique. Enfin, rappelons que l’attentat a été revendiqué par Al-Qaeda au Maghreb islamique, qui est un groupe combattu par l’État islamique.

Je ne cherche pas ici à tourner en ridicule les familles des victimes qui vivent en ce moment un deuil effroyable. Si je démontre que les positions de cette femme ne sont pas rationnelles, ma cible est plutôt tous ces médias complaisants qui se font les porte-paroles de cette rage comme s’il s’agissait d’autre chose. Comme si le deuil et la souffrance avaient transformé soudainement cette mère en une géo-stratège.

On a vu notre premier ministre caricaturé en hippie vivant dans un monde habité par des licornes. Pourtant, après des décennies de devoir d’ingérence, après les invasions d’Afghanistan et d’Irak et leurs terribles résultats, comment peut-on encore aujourd’hui prôner la même politique ?

Avec leur mémoire courte et leur désir de sans cesse répéter les mêmes erreurs en espérant obtenir des résultats différents, ce sont plutôt les détracteurs de notre premier ministre qui devraient se demander si ce n’est pas plutôt eux qui vivent dans un monde de licornes.

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