L’assurance maladie porte bien son nom

Qu’attendons-nous donc pour faire de notre assurance maladie une assurance santé?

En 1969, l’établissement de l’actuel système d’assurance maladie était tout à fait nécessaire. Rappelons qu’auparavant, on devait parfois se ruiner pour se soigner. L’idée derrière la mise en place de l’actuelle Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) était donc de retirer un fardeau du dos des malades. Toutefois, à l’heure où l’on vit de plus en plus vieux, où le système de santé est à bout de souffle, ne serait-il pas temps de remettre en question l’approche curative de notre système de santé? N’avons-nous pas d’ailleurs, tout au long de la pandémie de SARS-COV2 qui sévit toujours, préféré l’approche préventive à l’approche curative?

Des économies pour l’État

Certes, universaliser un accès gratuit aux soins de santé préventifs — physiothérapie, dentisterie, médecine du sport, services d’un-e nutritionniste, soins psychologiques, etc. — constituerait une dépense supplémentaire pour l’État. Je peux déjà entendre les détracteurs de l’intervention de l’État s’y opposer; cependant, il faut considérer les coûts qu’engendrent les soins qu’on doit prodiguer à des gens qui, faute de moyens pour consulter hâtivement, traînent dans leur valise des pathologies souvent devenues bien graves au moment de se présenter à l’urgence ou chez leur médecin (s’ils en ont un).

Prenons un exemple concret. Ne serait-il pas plus payant de payer les honoraires de physiothérapie de quelqu’un qui souffre de douleurs chroniques au genou plutôt que de le laisser traîner ce problème jusqu’à ce que la chirurgie devienne le seul recours possible? La chirurgie sera beaucoup plus coûteuse en elle-même, engorgera le système de santé, nécessitera une hospitalisation, puis une convalescence (pendant laquelle le convalescent ne travaillera pas, donc privera l’État de revenus). Cerise sur le sundae : on devra sûrement, à terme, payer de la physiothérapie à cette personne afin qu’elle puisse réapprendre à utiliser son nouveau genou correctement.

On a collectivement appris qu’il vaut mieux se laver les mains et porter un masque que de se retrouver en réanimation pour avoir contracté la COVID-19. Pourquoi, alors, la même logique n’aurait-elle pas cours dans la prévention des maladies chroniques qui sont présentement soignées seulement lorsqu’elles sont au pire de leur dégénérescence?

Le caviar de Big Pharma sur le dos du contribuable

En 2013, 7.5 milliards de dollars étaient dépensés en médicaments par l’État, soit 19% du budget en santé de l’époque. Rappelons qu’en 1980, la part du budget en santé allouée aux médicaments n’était que de 6%. Sachant que le Québec est l’un des endroits du monde où l’on est en mesure de produire des médicaments, il irait de soi que le gouvernement mette en place un système de production de génériques pour les médicaments les plus nécessaires et les plus largement administrés (antibiotiques, antihypertenseurs, anticholestérolémiants, etc.). Pourquoi charger l’État de les produire alors que l’assurance publique rembourse ces produits, me direz-vous? Parce qu’on évalue qu’un cachet coûtant, par exemple, 10 sous à produire est vendu 1.30$.[1] Énorme gaspillage de fonds publics. Mentionnons aussi que se doter de tels moyens préviendrait également les pénuries de médicaments telles qu’il risque de s’en produire lorsqu’advient une crise sanitaire.

Quand verrons-nous le jour de la prévention et de la santé se lever sur nos cartes soleil?

[1] Chiffres tirés de lesmedicaments.ca et de RADIO-CANADA (3 octobre 2014). Fabrique ses médicaments. https://ici.radio-canada.ca/infoman/article/2014/10/03/fabriquer-ses-medicaments/

Crédit photo : RAMQ

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