Courtoisie NASA

Julie Payette : « Les yeux vers les étoiles »

Courtoisie NASA

Julie Payette était à Québec le 9 novembre dernier pour une conférence intitulée «La Terre vue de l’espace : une autre perspective». Impact Campus a pu s’entretenir avec la première femme québécoise à devenir astronaute avant son arrivée dans la capitale.

Dominique Beaulieu

«Techniquement, le premier pied à se poser sur la Lune est un pied québécois fabriqué par une entreprise de Longueuil». Julie Payette avait cinq ans quand la navette Apollo 11 se posait sur la Lune le 20 juillet 1969. De quoi inspirer la jeune fille. «Toute petite, je levais les yeux vers les étoiles», lance celle qui a grandi à Montréal. Portée par cette passion, Julie Payette va faire ce qu’il faut pour réaliser son rêve.

Détentrice d’un baccalauréat en génie électrique de l’Université McGill et d’une maîtrise en génie informatique de l’Université de Toronto, la Montréalaise entre à l’Agence spatiale canadienne en 1992. «J’ai été très surprise. Je ne m’attendais pas à être choisie». Sur 5330 candidats, seulement quatre pouvaient devenir astronaute. Après un entraînement intensif, elle effectue son premier vol en 1999 et son deuxième en 2009.

La veille du départ, Julie Payette avait très hâte puisqu’il s’agit d’années de préparation. « Au moment du décollage d’une navette, lorsque l’on est astronaute, ce n’est pas comme lorsque l’on est passager d’un avion », mentionne-t-elle. « On est à notre affaire, surtout lors de mon deuxième vol, car j’étais ingénieure de vol. J’avais des fonctions où toute mon attention était requise, on est alerte à toute possibilité d’avarie et à ce que l’on ferait dans ce cas là ». Et est-ce que l’exploit de l’Autrichien Felix Baumgartner, qui a récemment fait une chute libre de plus de 39 km, permet d’envisager l’évacuation d’une navette en cas d’avarie? « Ce serait une conclusion trop hâtive, mais les données qu’il a recueillies seront utiles. Le problème est l’éjection d’un véhicule à très haute vitesse. C’est comme sauter d’une voiture immobile ou sauter d’une voiture en marche. Un ballon et une navette, ce n’est pas la même chose ».

Ainsi, Julie Payette compte 611 heures de vol dans l’espace à son actif et a séjourné à deux reprises dans la Station spatiale internationale (SSI). Cette dernière est née d’une collaboration entre des pays de cultures et de langues différentes. « Chacun doit apprendre la langue de l’autre », affirme l’astronaute québécoise qui, en plus de parler couramment le français et l’anglais, peut converser en allemand, en espagnol, en italien et en russe. « Tout le monde a un niveau minimal en anglais et en russe. Plusieurs astronautes américains et russes parlent très bien français. » De son côté, la Chine ne collabore pas à la SSI. « Ils veulent montrer ce dont ils sont capables seuls, comme les Américains et les Russes le faisaient pendant la Guerre froide. Aujourd’hui, chose impensable il y a 30 ans, ils travaillent ensemble. Cette attitude de la Chine est donc temporaire selon moi. »

Astronaute est un métier à risque. On peut donc se demander si l’on remet une pilule de poison à Julie Payette et ses collègues au cas où une mission devrait mal tourner. « Bien sûr que non », a répondu la Québécoise, amusée. « Si quelque chose devait arriver, je suis très bien entraînée pour y faire face. Il n’y a pas d’appréhension. Il y a des milliers de gens qui travaillent sur la navette, j’ai une entière confiance en eux et je n’ai aucun doute sur leurs compétences et leurs qualités. »

Julie Payette évite de prendre position politiquement, mais elle croit à l’importance du financement public de la recherche. « Comme société, nous voulons bénéficier des résultats de la recherche pour améliorer nos produits électroniques, pour pouvoir voyager en avion, ou encore pouvoir un jour guérir le cancer. On doit investir dans ce monde qui n’est pas encore là. C’est ça le progrès. »

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