Ornithologie, la nuit
Philippe B
Bonsound
Suite à l’opus Variations fantômes tant acclamé en 2011, Philippe B nous offre ce printemps un quatrième long projet, une lente symphonie de cordes claires et graves, entre lesquelles sa voix domine. Supportée à maintes occasions par des cuivres, la mélodie du compositeur reste fidèle à sa nature. D’autant plus qu’elle ne surprend en rien.
Philippe B et la rime forcée – une poésie magnifique à la première ligne, qui déçoit à la seconde par son obligation de rimer. Bien qu’on l’entende moins sur ce nouvel album, Ornitologie, la nuit, l’appréhension se justifie dans des vers tels que « Les abeilles tournent autour de tes cheveux de réglisses/le soleil de mai fait fondre mes disques d’Elvis », entendus dans L’année du serpent.
Encore là, cette candeur dans les mots rappelle la comptine. Surtout que ceux-ci s’enchaînent avec lenteur, le plus souvent au-dessus d’une guitare ou d’un piano seuls. La simplicité décevante, au coin des deuxièmes lignes, s’avère efficace d’emblée dans une chanson-comptine comme Cheveux courts, cheveux longs, où tous les vers finissent en « on » et ultimement par la phrase : « je l’aime de toute façon ».
B ne s’éloignent pas tellement de ses précédentes inspirations : guitares douces, pianos graves et cuivres soutenant le tout. Ainsi sa voix et ses paroles deviennent le centre de l’attention.
Sur Variations fantômes, on avait droit à des manœuvres un peu louches pour faire rimer le mot « soleil » – qui, soit dit en passant, revient assez souvent dans le registre de Philippe. Sur la toute fraîche pièce titrée Nous irons jusqu’au soleil, cette fois on ne tente heureusement pas de répliquer une rime en « eille ».
Ornitologie, la nuit laisse en suspens quelques passages et en trouble d’autres. Décisions sages et cohérentes, qui se distinguent du reste et représentent mieux le nocturne dans ce qu’il a d’incomplet.
Une nuit de la St-Jean sur le Mont Chauve, la meilleure d’entre toutes, offre un jeu plus complexe avec la rime et parfois ose ne pas rimer du tout, ce qui libère les images de leurs obligations. On sent que le mot chanté n’a pas été choisi pour sa propriété orale seulement, mais surtout pour illustrer un sentiment précis.
Pour les intéressés, le lancement de Ornithologie, la nuit aura lieu le 10 mai au Cercle.
3.5/5 Sébastien Blondeau