Le baseball est un sport où les chiffres parviennent à expliquer parfaitement le déroulement d’une partie. Toutefois, ce jeu a toujours provoqué une profonde fascination chez les mathématiciens, qui y voient une source inépuisable de probabilités et de conjectures irrésolues. Georges Desmeules part du sentiment que le baseball renferme une signification allant au-delà de l’exploit sportif pour installer le cadre de l’intrigue de son premier roman, Le Projet Syracuse paru aux éditions L’instant même. Une fiction historique au tempo saccadé, tel un match de baseball.
L’auteur explique en quoi consiste le fil conducteur du roman : «Je me suis basé sur des faits attestés de l’histoire du baseball et des mathématiques pour imaginer un personnage qui aurait été le témoin privilégié d’événements sportifs cruciaux qu’il met en relation entre eux grâce à la conjecture de Syracuse [une hypothèse mathématique reconnue comme vraie, mais que personne n’a encore pu prouver ou réfuter]».
Entraîné d’une certaine manière à découvrir une sorte de secret «base-balistique» protégé par un puritanisme américain quelque peu paranoïaque, Habermann (le mathématicien enquêteur) sera mené inéluctablement sur la piste d’Eddie Gaedel, le seul nain ayant jamais pris part à un match professionnel. «C’est à la fois une blague et un drame que l’histoire d’Eddie Gaedel, explique l’auteur. À la suite de son unique présence au bâton en 1951, les dirigeants du baseball majeur ont immédiatement interdit aux nains toute participation officielle à un match.»
Mais le plus célèbre nain d’Amérique est tué dix ans plus tard dans de mystérieuses conditions : les associations que l’Allemand Habermann fait entre le baseball et les mathématiques lui font soupçonner le réel mobile du crime. Georges Desmeules explique les inductions de son protagoniste : «Celui qui regarde attentivement un match de baseball y trouvera peut-être la clé de certaines énigmes car le baseball, avec son terrain évoquant la carte de l’Amérique tournée vers l’Ouest, s’ouvre vers l’infini, tout en conservant le rêve d’une symétrie parfaite. C’est un sport d’intelligence et d’intuition qui, tout humainement, laisse une place à l’erreur sur le tableau de pointage».
L’enquête devient alors un chaos de coïncidences entre le meurtre de Gaedel et l’histoire du baseball. «Évidemment, on peut faire dire n’importe quoi aux événements du baseball, précise Desmeules. N’empêche que les chiffres ne mentent pas : la conjecture de Syracuse devient alors l’indice qui permet à Habermann de consolider ses suppositions sur le crime.»
Avec Le Projet Syracuse, le lecteur amateur de baseball aura le plaisir de lier les légendes du sport en un formidable réseau d’interrelations où les chiffres et les rêves se confondent (malgré eux?) en un tout qui pourrait avoir comme nom l’Amérique.