Un changement de paradigme dans le marché du tutorat : c’est ce que proposent Louis Prévost et Pierre-Yves Mathieu par l’entremise de LaCote, une plate-forme web qui « encourage le partage du savoir ». Leur cheval de bataille ? Miser sur la qualité des tuteurs plutôt que de les exploiter.
Lors de ses travaux de maîtrise en physique à l’Université Laval, Louis Prévost avait un besoin criant d’argent. À la place de flipper des boulettes au casse-croûte du coin la fin de semaine, l’étudiant-chercheur d’alors se tourne vers le tutorat. « J’en avais fait auparavant, témoigne-t-il quelques années plus tard. C’était un moyen pour moi de faire de l’argent facilement tout en gardant le contrôle sur un horaire surchargé. »
Or, il est rapidement confronté à un problème de taille : se trouver des clients. « C’est vraiment compliqué », explique-t-il. Des annonces sur Kijiji ? « Ce n’est pas très professionnel. » Passer par des centrales spécialisées, comme Acadam et Succès Scolaire ? « C’est très décourageant de faire affaire avec eux. Certes, ils te trouvent des clients, mais te bouffent au passage 30 à 40 % de ce que tu charges. »
La solution restante : démarcher de manière autonome, chose qu’a ultimement faite Louis. « Or, cela exige beaucoup de temps et d’efforts, sans garantie de résultats. » S’il a été chanceux dans ses propres tentatives, le jeune physicien constate que le marché du tutorat est plutôt ingrat envers les tuteurs. C’est alors que Pierre-Yves Mathieu, un ami fraîchement bardé d’un MBA lui aussi de l’Université Laval, l’approche avec sensiblement le même vécu et les mêmes frustrations.
Mais, surtout, avec le même désir de changer les choses.
Anatomie de l’idée
Au fil de leurs conversations et de leurs essais et erreur, les deux comparses en viennent à la conclusion que c’est en traitant mieux les tuteurs que ce changement tant souhaité opérera. Concrètement, cela signifie de leur offrir ce qu’ils recherchent, soit un service gratuit, ouvert et qui les libèrent du dictat des centrales spécialisées. C’est ainsi que naît LaCote, un site web lancé début septembre.
« Avec cette plate-forme, nous offrons gratuitement le modèle d’affaires de nos compétiteurs, parce que nous le trouvons aberrant, lance Pierre-Yves. Nous pensons sincèrement que le tutorat est l’une des meilleures façons d’enseigner, de là l’envie de le valoriser. » Sur LaCote, les tuteurs gardent 100 % de leurs revenus tout en bénéficiant des mêmes services que chez les compétiteurs. Les étudiants à la recherche de tuteur peuvent également « magasiner » leur tuteur.
Or, comme les deux entrepreneurs ont des visées commerciales – après tout, personne ne vit d’amour et d’eau fraîche —, ils décident d’instaurer des mécanismes complémentaires payants à LaCote. Cela prend la forme d’une « preuve de qualité », une évaluation recueillie auprès des étudiants tutorés à la fin de chaque intervention. Selon leur envie, les tuteurs peuvent ensuite acheter ces dernières afin de se bâtir un profil public, l’équivalent d’un « level-up » dans tous bons jeux de rôle.
« On invite les tuteurs à investir dans leur cote. Cela démontre un sérieux et envoie un signal fort aux étudiants potentiels qui sont à la recherche d’une perle rare. Le tuteur peut, selon ses objectifs, décider d’augmenter son salaire en toute légitimité », affirme Louis.
À venir
Pour l’instant, seule la première phase du projet, celle dite de « libération des tuteurs », est en cours. La seconde phase, où les processus d’évaluation des qualités des tuteurs seront mis en place, débutera cet hiver. Si tout va bien, tout devrait rouler au printemps, assurent Louis et Pierre-Yves. Le site web n’est disponible qu’en français, bien que des projets de traduction soient sur la table.
« Nous avons clairement une meilleure offre que nos compétiteurs. Donc, si ça ne marche pas, c’est qu’il y a un problème dans notre formule », croient-ils. Le défi, selon eux, sera de faire comprendre la nécessité de l’évaluation aux étudiants tutorés. Après tout, c’est là que LaCote se démarque.
Dans la tête des deux entrepreneurs, il ne fait aucun doute qu’ils ont mis au monde une idée qui bénéficie à tous sur le marché. « Ultimement, c’est l’étudiant qui bénéficie de ça, car il n’a pas à subir la hausse de 10, 15, 20 % que le tuteur d’une centrale lui impose pour atteindre la rentabilité », conclut Pierre-Yves.
30 à 40 %
Pourcentage du salaire des tuteurs gardé par les centrales spécialisées.
25 $/heure
Salaire horaire de départ suggéré par Louis Prévost et Pierre-Yves Mathieu aux nouveaux tuteurs sur LaCote.
5 minutes
Temps nécessaire pour s’inscrire sur LaCote, selon les créateurs.
Ludification
Utilisation de mécanismes issus des jeux vidéo afin de rendre des applications web et mobile plus immersive.
www.lacote.ca
Le site web de LaCote.