Un texte d’un auteur japonais sur le fameux Marquis de Sade, mis en scène par une femme de théâtrale expérimentée : on peut dire que le Théâtre du Trident fait preuve d’audace.

Femmes, je vous…

Madame de Sade

Un texte d’un auteur japonais sur le fameux Marquis de Sade, mis en scène par une femme de théâtrale expérimentée : on peut dire que le Théâtre du Trident fait preuve d’audace.

Cyril Schreiber

Pourtant, au bout des deux heures que dure Madame de Sade, le constat est évident : cette pièce s’inscrit parfaitement dans le canevas du Trident, à savoir du grand théâtre classique aussi lourd que magnifique.

Le sujet, pourtant, est original. C’est par l’absence que se dessine le portrait de Donatien Alphonse François de Sade, qui donnera son nom au mot sadisme, vu par six femmes : Renée, sa marquise et épouse, Madame de Montreuil, la mère de cette dernière, Anne-Prospère, sœur de Renée, Baronne de Simiane, amie d’enfance de Sade, Comtesse de Saint-Fond, représentante à elle seule du Péché, et Charlotte, la femme de chambre de la maisonnée. L’action s’étend sur trois années (1772, 1778 et 1790, peu après la Révolution française), dans un décor épuré, laissant la place au texte.

Ce texte de Yukio Mishima, traduit par André Pieyre de Mandiargues, est intelligent, présentant la Femme dans toute sa complexité : complicité, amour et fidélité, mais aussi libertinage, perversité et soumission. Les différents personnages sont ainsi étoffés et profonds.

La mise en scène de Martine Beaulne respecte les différentes ramifications de la dramaturgie, en lui imposant peu d’effets, sinon ce mur transparent à l’arrière-scène derrière lequel se déroulent des scènes plus métaphoriques, imagées. Saluons aussi le magnifique travail de Claudia Gendreau et Catherine Higgins aux costumes, qui ont fidèlement représenté la fin du XVIIIe siècle.

La distribution des six actrices est égale et efficace, mais soulignons quand même le talent de Lise Castonguay, qui incarne une Comtesse de Saint-Fond tellement libérée de toute contrainte morale qu’elle apporte quelques pointes d’humour, ainsi que la performance éblouissante d’Éva Daigle dans le rôle de la Marquise de Sade, qui s’inscrit d’ores et déjà dans les interprétations théâtrales les plus marquantes de cette saison, rien de moins.

Il y aurait eu certainement à couper à quelques endroits dans la pièce, parfois trop verbeuse et donc ennuyante par moments. Mais la qualité et l’importance du propos reprennent heureusement le dessus, et si Madame de Sade manque sûrement de folie, c’est peut-être parce qu’elle ne s’y prêtait pas. Il suffit parfois de se contenter des spécialités maison.

Quoi ? Madame de Sade

Qui ? Texte : Yukio Mishima, mise en scène : Martine Beaulne

Où ? Théâtre du Trident/Salle Octave-Crémazie du Grand Théâtre de Québec

Quand ? Jusqu’au 31 mars

Crédit photo : Courtoisie, Vincent Champoux

Auteur / autrice

Consulter le magazine