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Le PLQ en mode séduction

Le décompte est lancé, les élections générales provinciales approchent à grands pas. Le gouvernement a neuf mois pour convaincre les Québécois de lui accorder un second mandat. Bien que le PLQ ait eu des résultats économiques positifs, les intentions de vote ne lui sont toujours pas favorables. 

Selon les données de l’outil d’analyse Poltext, le gouvernement libéral a tenu ou est en voie de réaliser 76% de ses promesses électorales. Malgré ce chiffre impressionnant, force est d’admettre que le gouvernement n’est toujours pas premier dans les intentions de vote.

Le PLQ maintient son pourcentage d’environ 30%, sans pour autant faire des gains dans les circonscriptions qui ne lui sont pas acquises d’avance.

La question à se poser est : quelles sont actions qui expliquent que malgré les promesses tenues, le gouvernement Couillard peine à séduire les Québécois? C’est l’une des nombreuses interrogations sur lesquelles se sont penchés une vingtaine de chercheurs lors d’un colloque tenu à l’Université Laval en mi-décembre dernier.

Organisé par les professeurs François Pétry et Lisa Birch, le colloque avait pour objectif d’analyser l’année 2017 du gouvernement Couillard. Parmi les conclusions présentées, il y a le fait que le gouvernement semble stigmatisé par le spectre de l’austérité économique qui a marqué son début de mandat. Bien qu’on ne puisse pas reprocher au gouvernement d’avoir caché son intention d’être plus rigoureux dans ses politiques budgétaires, les conséquences de celles-ci sont encore bien gravées dans la tête de certains électeurs.

« Bien que le gouvernement ait dégagé des surplus budgétaires et qu’il réinvestit actuellement. Le fait est que bien des gens qui ont perdu des services ne sentent pas avoir reçu des compensations significatives », explique François Pétry.

En effet, depuis que le dernier budget Leitao a annoncé que le gouvernement avait fait des surplus budgétaires, de nombreux investissements ont été annoncés. Pourtant, la population ne semble pas avoir avalé la pilule encore.

 Le PLQ est-il victime de l’usure du pouvoir?

Il faut bien l’admettre, en dehors des 18 mois au pouvoir du gouvernement Marois, le Québec est gouverné par le PLQ depuis presque 15 ans maintenant. Tout parti politique ayant été aussi longtemps au pouvoir en subit inévitablement les contrecoups de l’usure du pouvoir.

Bien que nous soyons passés des Libéraux de Jean Charest à ceux de Philippe Couillard, le discours politique reste sensiblement le même. De plus, selon les deux experts, il est étonnant qu’un gouvernement ayant autant respecté ses promesses soit encore à la traine à moins d’un an des élections.

Autre fait surprenant: la montée de la CAQ dans les sondages. Le parti de François Legault propose plusieurs politiques similaires au PLQ, mais il semble que les Québécois souhaitent avoir un nouveau parti aux commandes.

Autrement dit, les Québécois veulent les résultats économiques qu’ils ont actuellement, mais ils désirent un nouveau messager apparemment.

Il faut dire que le premier mandat du gouvernement Couillard n’a pas été un long fleuve tranquille : frustration populaire à cause des politiques budgétaires, conflits de travail dans le secteur de la santé, loi sur la neutralité religieuse, l’entente avec Bombardier, la vente de plusieurs entreprises québécoise à des intérêts étrangers, plusieurs scandales qui ont conduit à la démission de ministres tels Yves Bolduc, Sam Hamad, Jacques Daoust, scandale sexuel de Gerry Sklavounous, l’affaire Guy Ouellette, plusieurs remaniements ministériels, résultats en dessous des attentes lors d’élections partielles, etc.

Bref comme on dit, le PLQ ne l’a pas eu facile depuis son retour au pouvoir et malheureusement pour lui, les taches à son dossier voilent en quelque sorte les gains importants qu’il a réalisés au courant de son mandat.

Bien que plusieurs dossiers importants soient sur la table du gouvernement au courant des prochains mois, il serait étonnant que ceux-ci réussissent à bouleverser l’opinion populaire envers le PLQ.

Par contre, neuf mois en politiques c’est une éternité, bien des choses peuvent se passer sans compter tous les rebondissements qui peuvent survenir en campagne électorale, comme l’ont souligné François Pétry et Lisa Birch.

Un héritage à double tranchant

Poursuivant dans la même lignée de l’usure du pouvoir, la relation particulière entre Philippe Couillard et l’héritage de Jean Charest est un autre point avancé par les professeurs de l’Université Laval.

Souvenons-nous qu’en début de mandat, Philippe Couillard mentionnait vouloir faire de la politique autrement. Terminer les discours incendiaires, les joutes verbales émotives, le temps des débats de l’ère Charest étaient révolus.

Pourtant trois ans plus tard, notre premier ministre est tombé lui aussi dans la rhétorique de son prédécesseur. Nous avons seulement à repenser aux accusations qu’il a envoyées à ses adversaires qui, selon lui, sèment la division au sein de la société québécoise. Sa relation avec les médias aussi a commencé à être moins cordiale qu’en début de mandat.

De plus, Philippe Couillard semblait pendant un moment vouloir faire table rase du passé, il voulait établir une fracture entre son administration et celle de Jean Charest. Pourtant, les mêmes scandales continuent de suivre le Parti libéral, rendant encore plus surprenant, l’éloge soudain qui est fait envers Jean Charest. La preuve étant la place qui lui a été accordée en marge du dernier congrès du PLQ.

Une stratégie intrigante, considérant que le gouvernement Charest est encore associé, pour certains, à de nombreux scandales ayant terni l’image de son parti.

Un nouveau clivage gauche/droite

Sortons maintenant du cas unique du PLQ, pour analyser les autres forces politiques qui tenteront de ravir le pouvoir aux libéraux en octobre prochain.

La CAQ a le vent dans les voiles. Les sondages leur sont favorables depuis des semaines. La CAQ semble bénéficier du fait qu’elle ne s’implique pas dans le débat de la question identitaire.

Cette fameuse question qui pendant presque quarante ans a divisé l’électorat québécois, mais qui aujourd’hui semble avoir perdu en importance. Il est maintenant davantage question d’orientation purement politique. Les valeurs des électeurs sont plus larges et avec les récents débats qui ont eu lieu entre des groupes d’extrême gauche et d’extrême droite, on peut se demander si c’est ce nouveau clivage qui segmentera la population d’ici la prochaine élection.

Rarement, le Québec a vu ses partis politiques se confronter par rapport à la place qu’ils occupaient sur l’échiquier politique. Toutefois, avec le manque de ferveur envers le PLQ, l’effondrement du PQ, et la montée en puissance de QS et de la CAQ, l’hypothèse d’une restructuration de la carte politique québécoise est envisageable.

Il n’est pas question ici de croire que d’ici octobre prochain le PLQ et le PQ vont disparaitre, mais dans un avenir rapproché de nouvelles puissances vont peut-être davantage prendre de place.

François Pétry souligne que si la CAQ devait gagner les prochaines élections, il deviendrait par le fait même le rival officiel de Québec Solidaire, car les deux partis sont très opposés idéologiquement parlants. Le Québec est-il en voie de basculer dans un clivage gauche/droite? Seul l’avenir nous le dira, mais les signes vont dans ce sens.

Il sera possible dès septembre de se procurer un recueil d’une vingtaine de chapitres présentant les diverses conclusions du colloque sur l’année 2017 du gouvernement du Québec.

Auteur / autrice

  • Thomas Thivierge

    J'ai fait mon secondaire au Séminaire Marie-Reine du Clergé. J'ai fait mon cégep à Alma en sciences humaines. Depuis 2012, je suis en communication publique avec spécialisation en journalisme à l'Université Laval. J'ai depuis écrit pour les journaux étudiants l'Exemplaire et Impact Campus. Je suis passionné par la politique, l'histoire, le sport et le cinéma en particulier.

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