La grande révolution de la numérisation a lancé le monde dans une quatrième révolution industrielle. La communication n’aura jamais été aussi directe. « La différence avec les autres révolutions, c’est que celle-ci est beaucoup plus rapide », explique André Raymond, directeur du Service de placement de l’Université Laval (SPLA). Presque tous les secteurs vont être touchés, que ce soit en usine, au public, en tourisme ou en culture; tout le milieu de l’emploi est en plein changement. La transformation devrait aussi mener à de nouvelles opportunités.
« C’est certain qu’il y a des trucs qui ne feront plus, au même type que l’arrivée de la machine a vapeur à été une très mauvaise nouvelle pour les fabricants de fers à cheval », poursuit André Raymond. Selon lui, ce serait toutefois plus une transformation qu’une élimination. À court terme, il estime que ce ne seront peut-être qu’environ 10% des postes qui seront portées à complètement disparaître.
« Nous, au Service de placement, ça va nous demander d’avoir une connaissance un peu plus fine, de comprendre, sans nécessairement prédire, les impacts et de questionner les entreprises pour identifier les risques », perçoit le directeur du SPLA. Cela dans l’objectif de mieux informer les étudiants et qu’ils soient en mesure d’élargir leur horizon et d’aller chercher des formations complémentaires.
Le directeur du Service de placement souhaite pouvoir accompagner les gens dans le changement. Comme il le dit, c’est environ 50% des emplois qui seront appelés à changer.
Les compétences du travailleur du futur selon l’Institute for the future (IFTF)
- Donner un sens et déterminer la signification profonde de ce qui est exprimé
- Intelligence sociale
- Réfléchir et trouver des solutions en dehors des règles établies
- Capacité d’opérer dans différents contextes culturels
- Pensée computationnelle et capacité à traduire et à comprendre des données
- Littératie des nouveaux médias
- Transdisciplinarité
- Sens du design
- Filtrer et hiérarchiser l’information selon l’importance
- Collaborer virtuellement
« Aujourd’hui, il y a plein de compétences qui sont à bien des égards essentielles, alors qu’il y a 30 ans, aucune de celles-ci n’était requise dans le marché du travail », relate M. Raymond, illustrant la rapidité du changement.
Ce qui est une bonne nouvelle pour l’un peut être une mauvaise nouvelle pour l’autre. La révolution numérique n’a pas que des impacts positifs.
Longue liste d’enjeux
« Les problèmes potentiels sont infinis et c’est difficile de les prévoir, mais ça serait se mettre la tête dans le sable de dire qu’il n’y en aura pas », convient M.Raymond. Selon lui, il y aura sans doute beaucoup de travail pour les chercheurs, surtout de sciences sociales.
Le directeur du SPLA donne en exemple les pays où presque la totalité de la production provient de la main d’œuvre, comme le Bangladesh dans le secteur du vêtement. « C’est sûr que si les entreprises sont en mesure demain matin de produire ici automatiquement avec des machines et à moindre coût, il y a fort à parier qu’elles rapporteraient leur production ici pour sauver les frais de transport », précise M. Raymond. Il souligne ainsi le risque de voir l’écart entre les pays riches et les pays pauvres s’agrandir.
Cette quatrième révolution industrielle a aussi des effets à une plus petite échelle. Le directeur soulève des questions par rapport à ses impacts sur les relations interpersonnelles et sur la capacité des gens à suivre le nouveau rythme parfois imposé. « Est-ce qu’il y a plus de gens qui prendront leur retraite plus tôt ou qui tomberont en maladie ou, au contraire, est-ce qu’il y aura plus de gens avec plus de temps pour des loisirs? », nuance-t-il, faisant allusion à l’efficacité qui est gagnée dans certains secteurs.
Pour l’instant, la numérisation a touché à différent niveau certains secteurs économiques, où les lois tardent à être adaptées. « On le voit avec Uber, mais c’est aussi la même chose avec AirBnB et en culture avec Netflix », illustre M. Raymond.
L’ère du personnalisable
« Un autre changement qu’on voit c’est par exemple avec les imprimantes 3D qui peuvent imprimer des pièces de métal aussi résistantes que si elles avaient été usinées, mais à une fraction du prix », s’étonne le directeur du Service de placement. Cela fait en sorte qu’il est possible maintenant de produire, en petites quantités, des pièces spécifiques de façon rentable.
M. Raymond voit en ce développement l’aube de l’ère du design, où il sera possible d’avoir beaucoup plus de personnalisation. « Le fait de produire en petites quantités va probablement ouvrir des opportunités par rapport à comment tu designes ton produit », remarque-t-il. Les emplois hautement spécialisés en industrie risquent peu à peu de remplacer ceux des machinistes, comme c’est déjà le cas dans certaines usines, tel que le relate le directeur du SPLA.
Suite du dossier : Chronique d’un employeur nouveau genre