Dans Monsieur Ho, son premier roman, Max Férandon nous invite à suivre son personnage à travers la Chine d’aujourd’hui, où être vivant signifie «être plusieurs». Sa mission : recenser 1,3 milliard de Chinois.
L’action se déroule quelque trente ans après la Révolution culturelle et Mao Zedong, juste avant les Jeux Olympiques de Pékin, quelque part entre passé et avenir, dont on ignore lequel serait le plus difficile à définir. L’auteur met en scène un pays qui s’ouvre sur le monde et qui sent le «besoin pressant de dessiner son propre portrait» : «En Chine, on avait longtemps compté qu’un seul journal intime pour des centaines de millions d’individus, un petit livre rouge péremptoire et dictatorial. Monsieur Ho avait son petit livre juste à lui.»
Ce sont les pensées de Monsieur Ho consignées dans ce journal que nous suivons, lesquelles entrecoupent différents lieux que visitera monsieur Ho à bord de sa locomotive de recensement : une prison (passage effrayant, parmi les plus réussis) dont nul ne peut s’évader «sinon par un tunnel en forme de peine de mort», un chantier où a explosé la révolte trop longtemps contenue, et finalement les nomades des steppes mongoles, limite du paysage chinois. En d’autres mots, les laissés-pour-compte.
L’ironie de Férandon dépeint avec désinvolture une réalité dont il laisse le lecteur deviner tout le drame. Et ses phrases, du moins au départ, sont empreintes d’une poésie d’autant plus belle qu’elle se fait discrète. Au fil du roman, toutefois, le langage poétique se laisse voir davantage, de même que l’analogie construite par l’auteur, ce qui enlève au charme d’une fable tout de même convaincante.
Roman sur la mémoire et l’oubli, sur l’individualité et la pluralité, Monsieur Ho nous propose un pèlerinage davantage qu’il nous attire dans une intrigue.