La ministre de l'éducation supérieure Pascale Déry à récemment décidé de mettre la hache dans le programme de Bourses Perspective Québec. Crédit photo : Antoine Morin-Racine

Les associations étudiantes choquées du retrait des bourses Perspectives

La ministre de l’Enseignement supérieur Pascale Déry annonçait, il y a de ça une semaine, le retrait du programme de bourses Perspectives Québec une session plus tôt que prévue. Plusieurs associations étudiantes se disent choquées et préoccupées devant la non-reconduction de ce soutien financier à plusieurs étudiant.es en stages non rémunérés.  

Par Antoine Morin-Racine, chef de pupitre aux actualités

Le 7 février dernier, la ministre de l’Enseignement supérieure Pascale Déry annonçait en conférence de presse que la fin du programme de bourses Perspectives Québec mis en place en 2022 afin de pallier à la pénurie de main-d’œuvre dans certains corps de métiers en demande allait être devancée à la fin de la session d’hiver 2025. Même si les étudiant.es déjà inscrit.es aux programmes bénéficieront des bourses jusqu’à la fin de leurs études, la ministre a justifié sa décision en parlant de « résultats inégaux » dans les corps de métiers visés par le programme. Selon elle, les bourses auraient eu l’effet escompté dans les domaines de génie et technologie de l’information, mais pas en santé et en éducation.

Les bourses Perspectives permettaient à certain.es étudiant.es dans des corps de métiers en demande de bénéficier d’une bourse de 1500$ au cégep et 2500$ à l’université moyennant la réussite de leur session.

La CADEUL (Confédération des Associations d’étudiants et étudiantes de l’Université Laval) ne tardera pas à réagir à l’annonce de la ministre dans une publication sur Instagram, lui demandant de reculer sur sa décision considérant la « béquille financière essentielle » que représentent ces bourses pour une grande partie de ses membres et la précarité financière dans laquelle iels sont.

Pour Coralie Duchesneau, représentante externe à l’AÉSS (Association des étudiant.e.s en sciences sociales) et étudiante en travail social, le retrait prématuré de la bourse prouve qu’un salaire en bonne et due forme devrait être attribué au stagiaire plutôt qu’une rémunération par le biais de bourses qui peuvent aller et venir selon le budget du gouvernement.

Choquée par la nouvelle, une représentante de l’AEESIUL (Association Étudiante en sciences infirmières de l’Université Laval) indique que les bourses Perspectives étaient utiles pour leurs membres tant dans le cadre de leur stage qu’en dehors, ne serait-ce que pour payer le stationnement des hôpitaux où leurs stages ont lieu (11$ par jour), pour payer les fournitures scolaires, ou même les uniformes. Contrairement aux dires de la ministre, celle-ci nous révèle également que pour plusieurs des étudiant.es en sciences infirmières, les bourses Perspectives faisaient partie des raisons pour lesquels ils avaient choisi le programme.

L’ACRUL (Association de criminologie de l’Université Laval) considère la logique de la ministre « boiteuse » à ce sujet considérant que les programmes de santé et services sociaux sont contingentés selon les notes des applicant.es, mais aussi selon le nombre d’étudiant.es que les programmes sont capables d’accueillir. Même les représentantes de l’association avouent que les bourses ne palliaient qu’à une mince partie de leur stress financier, dans des domaines où les femmes sont surreprésentées et où les quarts de travail de 12 à 16 heures ne sont pas rares, celles-ci trouvent « simplement inacceptable » de « couper l’herbe sous le pied » des étudiant.es de la sorte.

Les représentant.es du METSUL (Mouvement des étudiant.e.s en travail social de l’Université Laval), elleux, se disent très déçu.es et en colère de la décision de la ministre. Les bourses payaient notamment pour une grande partie des frais de scolarité des étudiant.es ciblé.es par celles-ci, ce qui permettait d’alléger un peu le fardeau d’être en stage près de 30h par semaine en plus de travailler pour subvenir à ses besoins. Celleux-ci critiquent également le fait que le but premier des bourses n’était pas de rémunérer les stages et rappellent qu’elles n’étaient disponibles qu’à la fin des sessions et moyennant la réussite de l’étudiant.es.

L’Université, pour sa part, souhaite que « la fin du programme de bourses Perspectives Québec peut permettre de bonifier et d’étendre d’autres programmes gouvernementaux de soutien financier destinés à favoriser la persévérance et la réussite, notamment pour la formation de la relève en santé et en éducation. »

Peu après son annonce de vendredi dernier, la ministre mentionnait sur X (anciennement Twitter) que des bourses seraient disponibles dès l’automne 2025 « pour soutenir les étudiants durant leur stage obligatoire dans les domaines comme la santé, services sociaux, éducation ou éducation à l’enfance. » Joint par voie électronique pour plus de précisions, son attaché politique a affirmé qu’on parle ici d’un transfert d’une partie de l’argent des bourses Perspectives dans le programme existant de « Bourses de soutien à la persévérance et la réussite des stagiaires.»

Une majorité des représentant.es étudiant.es interrogé.es se sont dit sceptiques à ce sujet devant les dires de la ministre.

Une manifestation organisée par l’Union Étudiante du Québec pour contester le retrait aura lieu à Montréal vendredi.

« Avoir un stage non rémunéré, c’est accepter de s’appauvrir, de s’endetter. C’est de commencer sa carrière déjà pauvre.  […] Retirer les bourses Perspectives, c’est accentuer la détresse psychologique et financière de la communauté universitaire. C’est accentuer la pauvreté notamment chez les universitaires de première génération et les personnes qui ne reçoivent pas d’aide financière de la part de leurs parents ou famille. » – ACRUL 

« Ce n’est pas un luxe d’avoir des conditions favorables pour réussir et pour s’éduquer, c’est un droit. » – Coralie Duchesneau, représentante externe à l’AÉSS

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