Nous sommes en 2032. L’astéroïde B612 est devenu un véritable dépotoir et notre Petit Prince chéri un guide touristique homosexuel, sado-maso, dépressif et désabusé. Dans un récit d’un humour cinglant et provocateur, il nous livre un portrait noir de la condition humaine actuelle.
Marie-Claude Savoie
À l’arrivée de son millionième visiteur, le Petit Prince ( Hubert Bolduc ), qui n’en peut plus de faire visiter son petit astéroïde aux fans de St-Exupéry, décide de faire d’une famille ringarde ses propres marionnettes grandeur nature et de leur offrir un séjour qu’ils ne sont pas prêts d’oublier : leur faire mettre en scène son propre récit de notre monde contemporain. C’est ainsi, bien malgré eux, qu’ils interprètent l’arrivée d’Atlas ( Emmanuel Bédard ) sur Terre après que le Bras canadien en ait fait voir de toutes les couleurs à son entrejambe. Réincarné en musulman marocain, c’est à l’aide de sa fille ( Marjorie Audet ) qu’il entreprend de retrouver ce fameux bras et ainsi goûter à nouveau à ce plaisir inoubliable.
Abordant le multiculturalisme de notre société de plus en plus fast-food et du « je veux tout, maintenant et ici », c’est dans une fable trash que l’auteur, Jean-Philippe Lehoux, nous transporte. Tous accoutrés de tenues sadomasochistes, les comédiens interprètent une foule de personnages plus déjantés les uns que les autres. Une Janine ( Valérie Laroche ) tantôt astronaute, tantôt touriste tourmentée, une chanteuse jazz ( Joëlle Bourdon ) qui fait le tour du monde les yeux fermés et qui se transformera peu à peu en prostituée, ou encore un papillon monarque suicidaire, un chef d’armée assoiffé de guerres, un skieur allemand… grâce auxquels Jean-Michel Girouard dévoile toute la polyvalence de son jeu. D’une crédibilité frappante, chacun de ses personnages a sa propre identité et il se fond dans leur peau tel un caméléon.
Moralisatrice, Le Bras canadien et autres vanités est une pièce qui ne laissera personne indifférent par les réflexions qu’elle suscite. Toutefois, elle aurait davantage brillé en étant plus directe dans ses critiques, trop éparpillées. Malgré tout, le Petit Prince arrive bien à nous faire voyager dans sa vision du monde d’une tristesse absurde, mais bien réelle. Ne manquez pas Trainspotting, la prochaine pièce du théâtre Premier Acte, qui sera présentée du 9 au 27 avril.