« Amour pur, tendre et fraternel »

Avant même qu’un seul musicien ne pose les pieds sur la scène du Théâtre Petit Champlain le 5 septembre dernier, la table était mise pour un menu alléchant. La douze cordes et les multiples claviers qui y trônaient nous tendaient la main vers une époque où ils ont régné en maîtres…

Justine Pomerleau-Turcotte

La palette sonore déployée par Premier Ciel, groupe hommage à Harmonium, était effectivement riche et tout à fait à propos. Sauf quelques exceptions, le groupe formé de Mathieu Grégoire ( authentique voix de Fiori et guitare ), Julie Valois ( voix, Rhodes, clavier et accordéon ), François Fournier ( basse ), Sébastien Cloutier ( guitare et voix ), Bob St-Laurent ( batterie, guitare, mandoline et voix ) et Michel Dubeau ( vents ) a livré des interprétations fidèles, tout pour séduire tous ceux qui cherchaient à revoir sur scène ce qui avait été maintes fois entendu sur disque, sur vinyle ou en concert il y a 35 ans. La performance vocale est sur ce point particulièrement impressionnante. Grégoire, dont on peut constater l’appartenance indiscutable au registre de basse à chacune de ses interventions ( d’ailleurs pleines « d’amour pur, tendre et fraternel » ) entre les pièces, réussit pourtant à atteindre des aigus vertigineux et chargés d’émotions, rendant ainsi justice à son modèle.

Du côté des arrangements, on ne s’éloigne encore une fois que rarement des versions originales, et le son bénéficie d’un souci de précision historique d’envergure. Certes, Rhodes et autres claviers typés y sont pour beaucoup, mais les musiciens solides et polyvalents y sont pour plus. Ces derniers affichent un plaisir évident à exécuter ce répertoire dont ils sont les fiers messagers ( on suppose que le titre de groupe d’hommage à Harmonium autorisé par Fiori lui-même ne s’acquiert pas par hasard ).

En raison de cet enthousiasme contagieux, on pardonne les quelques longueurs lors de la seconde partie du spectacle, dédiée à la colossale Heptade. Ceci dit, cela aurait été un sacrilège d’amputer les marathons instrumentaux propres au rock progressif.

Les harmonies vocales justes et bien rodées, les solos de flûtes tantôt virtuoses, tantôt quasi-mythiques et la section rythmique plus que dynamique ne sont que quelques éléments attestant la qualité de la prestation pendant laquelle les classiques s’enchaînaient, pour le plus grand plaisir du public ravi de pouvoir démontrer qu’il connaissait les paroles à quelques reprises, et qui d’ailleurs n’a pas attendu la fin du concert pour ovationner le groupe.

Même en versant dans la nostalgie un peu réconfortante qui accompagne nécessairement un spectacle hommage, le groupe a évité le piège des discours à la « il-n’y-a-qu’à-cette-époque-que-la-musique-valait-quelque-chose ». Très appréciable. Ne restait plus qu’à savourer les classiques d’Harmonium dans la paix et l’allégresse.

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