La vie politique et publique du Cambodge semble être perturbée ce dernier mois. Des élections ont eu lieu le 28 juillet 2013 au Cambodge pour déterminer le parti au pouvoir pour la prochaine session parlementaire. C’est le parti de Mr. Hun Sen, le Parti du peuple cambodgien, qui a gagné avec 68 sièges contre 55 sièges pour le parti de l’opposition, le Parti du sauvetage national du Cambodge. Mr. Hun Sen règne sur le Cambodge depuis 28 ans.
Pierre Léveillé
C’est un des meilleurs résultats pour le parti de l’opposition dans les dernières années. Pourtant, le parti d’opposition avec à sa tête Sam Rainsy, chef de la coalition et de retour d’exil politique, conteste ces résultats et réclame une enquête indépendante sur les processus électoraux et de comptabilisation des votes en accusant le parti au pouvoir de leur avoir volé 2,3 millions de votes. Durant l’attente du jugement du Conseil constitutionnel, la police militaire s’était dite « prête à intervenir en cas de manifestation violente », a déclaré le porte-parole du Conseil des ministres dans le Phnom Penh Post. Depuis que la victoire de Hun Sen a été confirmée, la tension a augmenté lorsque le leader de l’opposition Sam Rainsy a annoncé un boycott pour la session d’ouverture du Parlement, en annonçant aussi des manifestations et en exigeant une enquête indépendante sur les irrégularités des dernières élections.
« Nous sommes ici pour trouver la justice pour les électeurs qui demandent un comité d’enquête indépendant sur les irrégularités des élections », a déclaré Sam Rainsy à une foule de 20 000 personnes au parc de la Liberté de Phnom Penh. Le Parti du sauvetage national représente entre autres les travailleurs, par la plus puissante et la plus grosse organisation de travailleurs, la « Free Trade Union », qui se bat depuis des années pour un salaire minimum décent pour les ouvriers des usines de textiles et pour les droits des fermiers expulsés de leurs terres.
Un mouvement syndical réprimé
Récemment, une centaine de grévistes ont été licenciés d’une usine textile sous-traitante de la compagnie Nike après une série de manifestations portant sur les salaires. La « Free Trade Union » précise qu’environ 300 d’entre eux ont été forcés à démissionner sans compensation. Les employés de ce genre d’usine et d’industrie, qui sont la clé de l’économie cambodgienne avec des exportations atteignant 4,6 milliards, se plaignent et souffrent notamment de sous-alimentation, de surmenage et de mauvaise ventilation des ateliers. Entre autres, des scènes d’évanouissements sont fréquentes dans ces locaux. Les licenciements collectifs sont fréquents dans cette industrie. Par exemple, selon les syndicats, l’usine SL Garment Processing, détenue par le Singapourien SL International Holdings et qui produit pour de grandes marques de l’habillement telles que Gap ou H&M, a licencié le 4 septembre 720 ouvriers et en a suspendu 5 000 autres, à l’issue d’une grève de deux semaines.
Des milliers de personnes ont manifesté au début septembre, dans les rues de Phnom Penh. Le mouvement sera-t-il réprimé ou bien la classe populaire sentira-t-elle qu’elle détient un levier de pouvoir contre le gouvernement et les entreprises bien établies ?