Selon l’auteur et conférencier, les sociétés canadiennes dont il est fait mention dans son livre exploitent les ressources minières et pétrolières de certains pays d’Afrique, notamment dans la région des Grands Lacs, dans la corruption, l’expropriation, la pollution, le pillage, l’évasion fiscale et l’alliance avec des seigneurs de guerre. Toujours selon M. Deneault, la présence et les actes des entreprises canadiennes sur place attisent les sanglants conflits qui paralysent cette région du monde. Dans un contexte où les guerres dans la région des Grands Lacs ont déjà fait environ quatre millions de morts, l’auteur se demande bien «comment on peut encore parler du Canada comme d’un État ami de l’Afrique».
Le problème est que ces sociétés bénéficient au Canada d’une protection juridique mur-à-mur, ce qui fait en sorte qu’elles peuvent avoir recours à des pratiques déshonorantes à l’étranger sans que jamais ici, au Canada, elles ne soient menacées d’une quelconque manière. Affirmant que les informations contenues dans Noir Canada ont été tirées de documents officiels, dont certains rapports publiés par le Conseil de sécurité de l’ONU, M. Deneault a tenu à souligner que toute la dissension actuelle n’est pas «l’affaire d’un seul livre; c’est l’affaire d’une cause.»
Toronto : royaume des mines
M. Deneault a également soulevé le fait que la Bourse de Toronto en est une de prédilection pour l’industrie minière. En effet, 60% des sociétés minières du monde y sont inscrites, ce qui en fait le centre mondial de l’exploitation minière. Sur ce point, il est clair : le Canada fait de ses citoyens des complices, puisque leurs épargnes se canalisent vers la Bourse de Toronto. Tous et chacun financent et profitent ainsi d’une situation indigne d’un pays développé et démocratique. «Est-ce qu’on a le droit de remettre en cause les structures et les institutions canadiennes?», s’est demandé M. Deneault, non sans sarcasme.
Poursuites
Quelques mois après la parution de l’ouvrage, Alain Deneault, les coauteurs de Noir Canada ainsi que les Éditions Écosociété se retrouvent au cœur des poursuites, enclenchées par les sociétés minières canadiennes Barrick Gold et Banro. M. Deneault estime que la population peut l’appuyer dans le combat qu’il mène en s’informant auprès de son conseiller financier afin de savoir vers où exactement convergent ses épargnes. «Veut-on contempler notre piscine creusée en voyant des gouttes de sang dedans?», a-t-il demandé à l’assistance.
Selon Jacinthe Ruel, enseignante au cégep St-Lawrence, «le cas est très intéressant du point de vue de l’histoire du développement en Afrique et pour l’aspect judiciaire de la situation.» Quant à Dominique Kambanck, un Sénégalais nouvellement arrivé au Québec et candidat au doctorat en sociologie à l’Université Laval, il s’est dit satisfait de la conférence livrée par M. Deneault. «J’ai pu entendre ce que j’attendais. Le combat doit prendre le départ à partir de l’Occident»,
a-t-il dit.