La première édition du Festival contre le racisme de Québec aura lieu du 16 au 19 février. Le coup d’envoi sera donné par le biais d’une projection cinématographique et de trois journées de spectacles musicaux. L’événement est né d’une volonté de se positionner de manière visible contre le racisme, selon le porte-parole du festival, Nicolas Villamarin.
En plus de faire partie du comité organisateur, celui-ci est étudiant au Certificat en histoire à l’Université Laval. L’organisme est composé d’une poignée de militants impliqués dans la défense des causes sociales. L’idée derrière le festival a germé à l’automne 2016.
La création de groupes d’extrême droite, fascistes et néonazis dans la ville préoccupait les organisateurs. « Il y a un discours qui est véhiculé à travers les médias, surtout les radios poubelles de Québec, qui propagent un discours haineux, qui s’en prend à une communauté en particulier, par exemple la communauté musulmane », dit-il.
Le jeune homme rappelle également que plusieurs groupes réclament au gouvernement québécois la mise sur pied d’une commission sur le racisme systémique. Au-delà des frontières du Québec, l’élection de Donald Trump aux États-Unis et la montée en popularité de plusieurs partis d’extrême droite en Europe sont aussi une source d’inquiétude.
Le Festival contre le racisme avait été planifié avant l’attentat du 29 janvier dernier à la Grande Mosquée de Québec. Les organisateurs n’ont pas pour autant modifié la programmation après cette tragédie. Comme l’explique M. Villamarin, il ne serait pas approprié de « vouloir utiliser une tragédie pour faire avancer le discours ».
Cela étant dit, le festival est solidaire avec les victimes et soutient la manifestation contre le racisme, l’intolérance et la haine. Organisée en collaboration avec le RÉPAC 03-12, celle-ci aura lieu le 18 février dans les rues de Québec et devant l’Assemblée nationale.
Artistes unis contre le racisme
Plusieurs prestations musicales de divers styles auront lieu les 16, 17 et 18 février au Fou Bar, au Cercle et à La Source de la Martinière. « On dit non au racisme en folk, en punk, en hardcore, en hip-hop, en reggae, en électro », peut-on lire sur la page Facebook du festival.
L’entrée aux spectacles est fixée à 10 $. Les sommes amassées permettent de financer le festival à but non lucratif. Une subvention du Syndicat étudiant et postdoctoral de l’Université Laval (STEP) a aussi été obtenue. Si des profits sont réalisés lors de l’événement, ceux-ci seront tous versés au Centre multiethnique de Québec.
En plus des spectacles musicaux, une projection du documentaire Corps en mouvement se tiendra au Tam Tam Café. Le film, co-réalisé par Nicolas Villamarin et Telki Sanabrai, traite des groupes qui performent sous l’étiquette « musique du monde ». Une série d’ateliers sur la question de l’extractivisme auront aussi lieu au même endroit. M. Villamarin espère d’ailleurs que le festival deviendra un événement récurrent, une sorte de tradition.
Statistiques à l’appui
Rappelons qu’en janvier 2016, l’Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures (AELIÉS) a produit un mémoire sur les enjeux d’intégration des étudiants internationaux à l’Université Laval. Près d’un quart des membres de l’association sont des étudiants d’origine étrangère.
La question du racisme n’est pas abordée dans la publication, mais celle de la discrimination et de la socialisation l’est. « On constate que 43,6 % des répondants ont affirmé ne pas avoir été en mesure de tisser des liens avec des étudiants québécois », peut-on lire. Près d’un répondant sur deux (48,5 %) s’est déjà senti rejeté, mis de côté ou ignoré par les étudiants québécois. »
Trois personnes sondées sur quatre affirment n’avoir jamais vécu de discrimination, d’insultes verbales ou de moqueries en raison de leur origine ethnique ou de différences culturelles. Ce sont près de 5 % des répondants qui rapportent avoir vécu « souvent » ou « toujours » de telles situations. « Encore une fois, bien que navrante, cette situation est loin d’être suffisante pour constater un problème systémique de discrimination à l’endroit des étudiants internationaux », indique le rapport.
Situation particulière
Si le racisme n’est pas explicitement abordé, les étudiants internationaux se sentent surtout ignorés, indique la présidente de l’AELIÉS, Milène R. E. Lokrou. « Moi, j’appelle ça une discrimination silencieuse. »
Au Québec, plusieurs voix réclament une commission sur le racisme systémique. L’AELIÉS ne fait pas partie des groupes ayant fait une telle demande, mais l’association ne s’y oppose pas non plus, selon les dires de sa présidente.
En ce qui concerne les étudiants internationaux, Mme Lokrou explique qu’ils doivent non seulement s’adapter à un nouvel environnement culturel, mais aussi percer les réseaux sociaux déjà établis.
«Les étudiants internationaux qui ne parviendront pas à tisser des liens vont se replier sur des gens qui viennent du même endroit qu’eux : soit du même continent, soit directement du même pays , conclut-elle. Il va donc y avoir un certain communautarisme qu’on peut remarquer en résidence ou alors dans les cours. »