Montaigne d’après Loup Bleu

Quand le fondateur d’une troupe de théâtre est un loup, à la fourrure bleue de surcroît, il faut s’attendre à ce que les spectacles proposés sortent des sentiers battus et surprennent ces humains qui composent le public. Avec Les Essais d’après Montaigne, le carnivore pose sur les hommes un regard animalier singulier. «Il se permet d’user d’un sens critique que les humains n’ont pas, explique Guy-Daniel Tremblay, co-fondateur du Sous-marin jaune. Ses commentaires sont plus acerbes. Il donne une autre perspective aux œuvres qui ont marqué la pensée humaniste».

Après avoir exploré les écrits de Descartes, La Bible et Voltaire, Loup Bleu a voulu dépoussiérer une œuvre majeure bien qu’un peu moins connue que les précédentes. «Les Essais de Montaigne sont trop riches pour être laissés dans la poussière. Ils font partie d’une époque, la Renaissance, qui est fondamentale dans notre histoire. Le contexte socio-politique du XVIe siècle, particulièrement les guerres de religion, appuie tout le spectacle», raconte Guy-Daniel Tremblay, manifestement passionné par le sujet.

Les Essais, publiés en trois livres distincts, constituent cependant un texte dense, écrit dans un français ancien, ce qui représente un défi de taille pour l’auteur Antoine Laprise, forme humaine du Loup Bleu. «Malgré la difficulté de s’en prendre à un tel ouvrage, il s’agit d’une synthèse très intelligente du personnage et de son œuvre, insiste l’acteur. On s’amuse beaucoup parce qu’il y a différentes façons d’interpréter ce texte-là.»

Cette pièce se démarque donc par ses propos mais aussi et surtout par sa forme, puisque l’essentiel du spectacle est un film mettant en vedette des marionnettes qui sont, elles, doublées par des comédiens humains. «Intégrer le cinéma au théâtre est une proposition nouvelle. Ça nous permet de jouer avec les dimensions de la mise en scène même si ça ajoute plusieurs contraintes techniques», affirme celui qui avoue être fasciné par les possibilités qu’offre la marionnette comme «outil théâtral». «Le pouvoir d’évocation de la marionnette est très fort. Elle permet d’aller là où l’humain ne peut pas aller», conclut celui qui, de toute évidence, s’est libéré de ses ficelles il y a longtemps déjà…
 

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