© Michel Gagné

Amour, vin et tromperies à l’Opéra

L’opéra de Québec revient cette saison avec une toute nouvelle production : Le comte Ory du compositeur Gioacchino Rossini. N’ayez crainte toutefois, les paroles ne sont pas en italien puisque le texte a été écrit par le dramaturge français Eugène Scribe. Vous avez donc jusqu’au 2 novembre pour découvrir cet opéra-comique, première représentation jamais mise en scène à Québec.

Par Camille Sainson, journaliste multiplateforme

Inspiré du vaudeville du même nom, Le comte Ory est un savant mélange entre une tradition française proche de Molière et l’opera buffa italien, cette esthétique comique si particulière. Présentée pour la première fois à Paris en 1828, la pièce fait la part belle à la joie de vivre, aux manipulations et aux travestissements. Le Comte Ory, tantôt déguisé en ermite puis en nonne, n’apparaîtra presque jamais sous son vrai jour. Farce et lyrisme s’accordent donc pour critiquer les mœurs d’une époque et le libertinage. Si la première partie est un peu longue, la deuxième s’ouvre sur une scène de tempête avec des effets stroboscopiques, rapidement suivie par un tableau grivois où le vin est mis à l’honneur. Ce deuxième acte vient nourrir notre intérêt et nous fait oublier le léger déséquilibre narratif.

© Michel Gagné

Comme à son habitude, l’opéra de Québec nous propose une distribution de choix avec des chanteur.euses qui, pour la plupart, signent là leur premier contrat avec la production. On regrette toujours que la salle ne diffuse pas mieux le son, certaines paroles étant très peu audibles, mais dans l’ensemble la musique fait honneur à Rossini. Les décors, quant à eux, favorisent la mise en abîme, la création de tableaux dans des tableaux où les voiles se succèdent pour enfin, laisser place à la vérité. Malheureusement, un choix technique a été fait : celui de faire venir les machinistes du théâtre pour déplacer les escaliers pendant la représentation. Façon de briser le quatrième mur de façon involontaire ? Il aurait été plus judicieux que des figurants s’en chargent afin de nous maintenir dans la fiction et de ne pas concentrer notre regard sur eux.

© Michel Gagné

Malgré ces petits détails, ce nouvel opéra d’une durée tout à fait acceptable de deux heures est accessible au grand public et parvient à réactualiser un air comique du XIXe siècle pour le plus grand plaisir d’un public québécois moderne. Si la question du consentement nous brûle désormais les lèvres – d’autant plus que, contrairement à Dom Juan, le Comte Ory n’est pas puni pour ses tromperies – nous apprécions quand même de nous plonger dans la dernière nuit rocambolesque de Rossini.

© Michel Gagné

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