Pour sa première proposition en tant que diffuseur, le collectif JokerJoker mise sur une carte qu’il connaît : la pièce Baiseries qui a été présentée aux Treize à l’hiver 2014 puis à La Malbaie l’été dernier.
Dans le salon, Anne-Marie remettra ses effets personnels à son ex, Louis. La rupture a été douloureuse pour le couple de 7 ans. Survenue dans un bar le soir de l’anniversaire de Madame, elle est causée par le flirt sans lendemain de Monsieur avec une autre. S’ensuit une série de nuits torrides où la jeune femme tentera d’engourdir la douleur dans le bras de ses amants.
Cette fois, l’œuvre de Jean-Philippe Baril Guérard ne foule pas les planches du Théâtre de Poche, mais de trois appartements de Québec à raison de trois soirs par quartier. Les 8, 9 et 10 octobre, le collectif formé de Thomas Langlois et Émile Beauchemin avait programmé la pièce dans un appartement de la 4e Avenue, dans Limoilou. Dans les prochaines semaines, la pièce se dirigera vers Saint-Sauveur, puis Saint-Jean-Baptiste.
Voir de proche proche
Dans ce cas, la pièce centrale de l’appartement est à la fois scène et salle de spectacles. La configuration très intime – une vingtaine de sièges de chaque côté de l’espace central – change complètement le rapport entre le jeu et le spectateur. « Ça oblige le spectateur à être très actif », voire à « prendre position par rapport à ce qu’il voit », explique le metteur en scène Jean-Nicolas Marquis.
Ce qui commande aussi un certain naturel chez les acteurs, qui voient leur public aussi bien que le public le voit. Dans un tel contexte, « tu ne peux pas jouer, il faut que tu vives le texte », lance Éric Robitaille, qui assume les multiples rôles d’amants d’Anne-Marie.
Bien malgré lui, le spectateur devient voyeur ou complice. Lors des moments plus osés de ces Baiseries, où les vêtements sont souvent accessoires, le spectateur est davantage à fleur de peau. Il l’est tout autant lors de la scène de presque viol où Anne-Marie se sauve d’un acte non désiré, dans la chambre d’à côté.
«Tu ne peux pas jouer, il faut que tu vives le texte.» – Éric Robitaille
Du Théâtre de Poche à un appartement
Le Théâtre du Quartel, troupe qui s’est formée pour pouvoir jouer la pièce à nouveau, avait dans la tête « d’apporter Baiseries dans son environnement naturel, se souvient Émile Beauchemin, qui fait aussi partie des membres fondateurs de la troupe. Pour moi, Baiseries se passait dans un appartement, c’est écrit pour un appartement. On voulait servir le texte au maximum de nos capacités. »
Originellement pensée pour le Théâtre de Poche, la mise en scène a donc du être revue. Aux dires de Jean-Nicholas Marquis, ça « a été un énorme défi » qui permettaient d’aller « à l’encontre complètement de ce qu’on a fait sur scène ».
En pleine représentation, l’espace manque pour les changements de scène, ce qui se traduit en un branlebas de combat généralisé. « On court en arrière du bloc derrière nous pour ensuite partir de la toilette et rentrer dans la scène suivante. On est en costumes et on court sur le trottoir, on arrive et on entre-ouvres la porte pour savoir où sont rendus les autres », illustre Éric Robitaille, acteur à l’origine du projet.
Trois mises en scène
Adapter à un appartement passe encore, mais l’entreprise menée par JokerJoker et le Quartel demande trois mises en scène distinctes. « C’est comme si chaque lieu était une carte différente avec laquelle on devait jouer », renchérit Thomas Langlois, autre Joker du duo.
Trois milieux de vie qui limitent pourtant les possibilités et surtout, le temps de répétition. « On a eu tellement peu de temps parce que l’appartement reste un milieu de vie » alors rien ne fonctionnait lors de la générale, se souvient Éric Robitaille.
Les autres représentations auront lieu dans les quartiers Saint-Sauveur (15-16-17 octobre) et Saint-Jean-Baptiste (22-23-24 octobre). Il est possible d’acheter des billets au jokerjoker.tk/billetterie