Photo: Courtoisie, ENO

Beaucoup de plaisir des Trois Accords : un agréable caillou dans le soulier

Dès la première ligne de basse de l’album Beaucoup de plaisir de la formation les Trois Accords, paru vendredi dernier sur l’étiquette Indica Records, on comprend que les musiciens originaires de Drummondville ont une fois de plus réussi à se réinventer, tout en gardant leur formule gagnante : des paroles absurdes poussées sur des vers d’oreille.

Faites toutefois l’effort de fouiller dans vos vieux disques compacts pour ressortir Gros Mammouth Album Turbo afin de comparer la voix nasillarde d’un jeune Simon Proulx aux mélodies vocales de cette dernière galette : la progression est plus qu’épatante. Ce sera aussi l’occasion de constater l’évolution musicale du groupe qui en est déjà à une sixième production depuis 2003. La ligne directrice absurde est bel et bien toujours présente, mais chaque album de la discographie a permis de réactualiser la signature Trois Accords.

Ancré dans les standards pop-rock, voire brit-pop, Beaucoup de plaisir tient promesse et risque d’entrainer quelques déhanchements dès la première écoute, avec plusieurs excellents grooves en contre-temps. Les mélodies de guitares d’Alexandre Parr sont par ailleurs toujours aussi efficaces pour soutenir le vocal et combler les espaces laissés par la section rythmique.

La production se veut lichée et les arrangements sont bien ficelés, ce qui sert habilement les dynamiques à l’intérieur des chansons, en plus de mettre en valeur les nombreuses subtilités rythmiques, la dernière corde ajoutée à l’arc du quatuor.

Corinne, premier extrait radio de l’album en est certainement l’un de temps forts, en plus d’être une bonne porte d’entrée pour (re)découvrir le groupe. « Et quand ça commence, il faut que je me dépense / Il n’y a pas de sens ou de deuxième degré » est une ligne du couplet qui pourrait résumer le projet en entier.

Dans la catégorie «chanson pop-rock ayant pour titre un prénom féminin», Rebecca est aussi une pièce qui déplace de l’air et qui donnera envie de pousser le refrain encore et encore. Tout comme Albino trois-quarts, qui est certainement la prestation vocale la plus intéressante de l’album.

L’absurde est présent dans l’ensemble des morceaux, (parfois un peu plus critique comme dans Activité de groupe, parfois carrément cabotin comme dans Commotion sur le ponton) avec une certaine cohérence autour de la thématique du plaisir. La composition des pièces s’y aligne aussi, avec des rythmes colorés. La chanson titre de l’album se veut littéralement la liste d’épicerie pour avoir « beaucoup de plaisir … ce soir » (à s’imaginer prononcé de manière saccadée, avec la mélodie de Welcome to the jungle de Guns n Roses qui enchaine).

Si l’on peut parler de quatrième mur en musique, la pièce Ouvre tes yeux Simon !, qui se veut une hymne au fait de chanter les yeux fermés en jouant de la guitare, résonnera chez tous les musicien(ne)s. « De la confiance en aérosol », «faire des voyages», «imaginer des personnages» et surtout « se souvenir de mes paroles » font partie des bienfaits de cette pratique plutôt répandue sur scène.

Beaucoup de plaisir vous fera passer un bon moment, un brin nostalgique, deux brins comiques et surtout, trois brins endiablés. Pour y arriver, il faut toutefois accepter de plonger à deux pieds dans l’univers des Trois Accords, dont les limites ne cessent de s’épandre et de surprendre à chaque parution.

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