L’Orchestre symphonique de Québec (OSQ) présentait jeudi dernier Aimez-vous Brahms ?, spectacle mettant en vedette la Symphonie no. 3 en Fa majeur du compositeur, rendue populaire grâce au film du nom de l’événement. Ce fut aussi l’occasion pour certains de découvrir un compositeur actuel, José Evangelista, ainsi que l’un des contemporains de Johannes Brahms, Max Bruch.
Pour débuter cette chaleureuse soirée musicale enveloppée par les lumières rougeâtres de la salle Louis-Fréchette, l’OSQ se servait d’une pièce exotique autant par ses arrangements mélodiques que par sa forme elle-même. Des gammes aux textures asiatiques s’amorçaient durant les premiers moments de la Symphonie minute, courte œuvre prenant la structure d’une symphonie créée par le compositeur espagnol José Evangelista. Mise en bouche efficace, elle animait les spectateurs au long de ses quatre mouvements caractérisés par la rapidité des enchainements produits par la section des cordes. Enchainements mélodiques rehaussés à coups de staccatos délivrés avec précision par l’ensemble des basses, et par la harpe aux subtiles résonances placée sur le flanc gauche de la scène. Après une série de crescendos, des fois disparates, des fois mélodieux, la Symphonie minute s’achevait par un déferlement de lignes musicales chromatiques descentes et ascendantes issues d’un dialogue entre les sections des bois, des cuivres et des cordes, s’arrêtant drastiquement pour accueillir une explosion d’applaudissements du public époustouflé.
Après une minute d’attente entrait en scène Karen Gomyo, talentueuse violoniste japonaise vivant à Montréal. Debout, partageant le devant de la scène avec Fabien Gabel, chef de l’Orchestre, elle offrait les premières notes d’un solo de violon perçant, l’instrument luisant sous les reflets des projecteurs de la salle. Après deux cadenzas dans le silence de Gomyo, l’Orchestre s’élançait dans le premier mouvement du Concerto pour violon no. 1 de Bruch, déclenché par Gabel en rabattant son bras après avoir hissé son poing dans l’air. Une ambiance mielleuse entretenue par l’Orchestre durant ce mouvement servait de support au solo de violon qui s’élançait et ensorcelait le public. Il terminait sur une note retenue par Gomyo avec une délicatesse à couper le souffle avant de démarrer le deuxième mouvement sous l’emprise des violons jaillissant de l’arrière. Entre chacun des solos morcelés du mouvement, Gomyo prenait son instrument en main et dirigeait son regard vers le vide, bougeant le corps de façon cadencée, envahie par le mouvement de l’Orchestre. Toute une démonstration de complicité entre l’artiste invitée et les musiciens dirigés par le maestro Gabel.
Après l’intermède, on plongeait rapidement dans la gravité de la symphonie tant attendue. Les violons, prenant rapidement les devants, se faisaient ensuite remplacer par des flûtes et des clarinettes hyperactives. Les percussions et les cuivres retentissaient formidablement à chacune de leurs interventions. Les violons berçaient le théâtre avec la mélodie principale, et les bois envoûtaient les spectateurs de leurs sons à la fois délicats et rêveurs. L’OSQ réussissait à toucher deux pôles : des mouvements suaves suivaient ceux évoquant l’agitation, les tons dramatiques laissaient place à l’espoir, le tout sous la direction d’un homme dont la passion émanait des mouvements de son corps, demandant toujours plus d’intensité à son orchestre lorsqu’elle entamait des crescendos oniriques.