Photo: Courtoisie, Cath Langlois Photographe

Un coup de hache au travers des conditionnements sociaux

Le mardi 6 novembre dernier, le théâtre Premier Acte présentait La fille qui s’promène avec une hache du collectif Kill ta Peur : la pièce dénonçait tout un monde à elle seule, tout en gardant la signature loufoque et philosophique du théâtre.

Dans le village de Malenfant, aux alentour de la région de Val-d’Or, les enfants sont voués à être un prolongement quasi identique de leurs parents. Tout le monde est libre et pourtant, personne ne peut quitter le village. En fait, Cindy-Lou est la première à vouloir le faire. Issue de l’union entre une mère autochtone et un père québécois, la fille fait face à la différence dès son plus jeune âge. Le suicide de sa mère marque un tournant dans sa vie : elle nourrit l’envie de partir très loin, « voir autre chose ». L’occasion se présente enfin lors d’un tournant majeur du XXIe siècle : l’attentat du 11 septembre 2001. Des hommes viennent s’entraîner pendant quelques mois dans le village avant de partir s’engager dans l’armée canadienne. Cindy-Lou reçoit la promesse d’un prochain départ, dans six mois. Elle est déterminée à s’entraîner par tous les moyens pour être prête à leur retour.

Photo: Courtoisie, Cath Langlois Photographe
Le manifeste contre la soumission

Kill ta Peur, un collectif de jeunes engagés, s’est formé par la volonté de montrer leur vision de l’humanité. Loin d’être manichéenne, la pièce parle avant tout de l’adolescence et des questionnements qui viennent avec celle-ci : qui suis-je ? où vais-je ? quel est mon but ? Des questions que tous se posent, mais que seule Cindy-Lou tente de résoudre, avec même une certaine violence, comme on le ferait lorsque l’on est si près du but. Dans ce village où tout le monde se regarde les uns les autres pour être sûr de ne sortir du rang à aucun moment, la jeune fille emprunte une autre voie pour se sauver elle-même. Au travers de tout cela, un triangle amoureux fait son chemin, un jeune homme découvre sa féminité, un autre veut connaître ses ancêtres, deux frères découvrent une dimension de leur relation qu’ils n’auraient jamais pu connaître sans un accident. De la jalousie, de l’amour, du désir, de la haine : c’est l’humain que l’on voit à travers cette pièce.

Des enjeux applicables à toutes les échelles

Dans les grandes villes, on trouve encore de la haine envers les minorités. On éprouve la peur face à une jeune fille qui se promène avec une hache, sans se demander ce que le poids que cet objet ancestral peut avoir dans son identité. Les mots n’ont pas le même sens pour tout le monde, alors on ne peut qu’interpréter, souvent à tort. Parfois, c’est fatal. On trouve encore des gens à l’échelle de la Terre qui marchent courbés pour ne pas être plus haut qu’un autre. Il y a encore des parents qui imposent un choix à leurs enfants et des enfants qui n’ont d’autres repères que le confort de la maison parce que l’extérieur est inévitablement glacial. Cindy-Lou n’a touché du bout du doigt qu’un court instant la délivrance d’un vent nouveau et ça a provoqué un torrent chez les autres jeunes, déterminés à devenir « grands ».

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