Surtout reconnue pour son travail dans le monde de la littérature jeunesse, Hélène Vachon nous offre cet hiver son deuxième roman pour adultes, La manière Barrow.
Jessica Pineau
Dans cette nouvelle histoire, l’auteure plonge tête première dans l’univers du théâtre et de la télévision. Elle allie réalité et fiction avec doigté pour mettre en scène le conflit intérieur de Grégoire Barrow, jeune homme timide à la voix d’or qui, le jour de ses 19 ans, prend la décision de devenir comédien.
« Au moment où le soleil aspergeait l’horizon d’un giclée d’or pâle, il ferma les yeux et tendit ses deux bras. Ses mains s’ouvrirent d’un coup, libérant la somme de tous les Grégoire possibles. L’un après l’autre, chanteur, orateur, avocat, politicien s’échappèrent en ricanant. Le fracas de leur chute raisonna longtemps à ses oreilles. »
Les temps sont durs et Grégoire devient un de ces comédiens qui ne jouent pas assez. Obligé de se réorienter, il se fait engager dans une boîte de doublage où sa voix est enfin reconnue à sa juste valeur. Tout semble s’arranger, mais Grégoire est plus perdu que jamais. Submergé par la marée de personnages qu’il doit créer, habitué de toujours jouer d’autres gens que lui-même, Barrow en vient à se demander qui il est vraiment. Incapable de distinguer l’homme qu’il est au travers de ceux qu’il doit incarner, il part à la conquête de lui-même. Aidé par une panoplie de personnages; son père, son ami Siméon, sa patronne et même son chien, Grégoire cherche désespérément son identité. Drôle, La manière Barrow a une façon unique de présenter l’univers du théâtre et les déboires des comédiens. Bien que ce soit le drame d’un seul homme, on se rend vite compte que c’est la présence des autres personnages qui donne toute sa profondeur à Grégoire et qui lui permet d’exister à part entière.
Le hic, c’est que le style d’écriture nous donne parfois l’impression d’avoir manqué une information essentielle au bon déroulement de l’histoire. On revient en arrière, on cherche, mais on se rend compte que non, c’est tout ce qu’il y a. C’est alors à nous de relier les détails semés çà et là pour arriver à voir le produit dans son ensemble. Les bouquins qui nous font travailler un peu l’esprit sont les bienvenus, mais celui-là nous laisse une légère sensation de ne pas avoir tout compris, comme si on voulait nous laisser croire que l’histoire ne s’arrête pas une fois le livre refermé.
Somme toute, Grégoire Barrow et Hélène Vachon réussissent à nous faire décrocher de notre quotidien pour nous faire nous blottir un bref instant dans la chaleur rassurante de leur douce fiction; et c’est tout ce qui compte.