Le dernier mercredi musico-poétique de l’automne avait lieu le 18 novembre dernier à la salle Henri-Gagnon. Pendant une heure, comédiens et musiciens se sont succédés sur scène avec simplicité et élégance, les uns récitant un poème, les autres interprétant un morceau, un mouvement ou un air. Le moment était beau ; l’échange, émouvant.
Les mercredis musico-poétiques sont nés il y a 17 ans, à l’occasion d’un voyage universitaire à Moscou et de l’heureuse rencontre entre Chantal Masson-Bourque, professeure à la Faculté de musique de l’Université Laval, et Denyse Noreau, enseignante en théâtre au Département des littératures. « Nous partagions la même conviction que les arts s’influencent et s’enrichissent mutuellement », se souvient Mme Masson-Bourque.
« Nous avions deux objectifs, explique Denyse Noreau. Nous voulions d’abord créer du bonheur, un moment de paix, de grâce, de joie. Nous souhaitions aussi offrir une tribune aux étudiants en musique et en théâtre, une occasion de pratiquer, de jouer devant public. »
« J’essaie toujours de tisser un fil conducteur qui fonctionne par contraste ou par association », raconte Chantal Masson-Bourque, professeure émérite à la retraite depuis 2007. « C’est essentiel d’avoir à se placer en situation d’urgence. On y découvre des ressources insoupçonnées. Du choc se passe quelque chose, à chaque fois il y a un miracle », renchérit-elle.
Jouer sans être jugé
La prestation sur scène n’est précédée d’aucune répétition. Les deux responsables coordonnent musiciens et comédiens, les étudiants pratiquent chacun de leur côté et ne découvrent leur pairage qu’au dernier moment. L’heure se déroule d’un seul tenant, sans être interrompue par des applaudissements avant l’ultime numéro. « Les étudiants participent pour le plaisir esthétique de faire la chose, ils jouent sans être jugés. C’est de la dégustation esthétique », illustre Chantal Masson-Bourque.
Rosie Belley, étudiante qui participe aux mercredis musico-poétiques depuis bientôt trois ans, abonde dans le même sens. « Cette activité est pour nous l’occasion d’essayer, de se mettre à l’épreuve. Les conséquences ne sont pas très lourdes : si on se plante, c’est surtout l’orgueil qui en prend un coup. Notre public est indulgent et très réceptif ».
Un monde de découvertes
Mercredi dernier, le programme était éclectique. Côté textes, Guillaume Apollinaire côtoyait Katri Vala, une poétesse scandinave, et Pabloemma, un artiste camerounais. Deux poèmes d’Alain Gagnon, ancien professeur à la Faculté de musique, ont aussi été lus, alors que les mots de Gaston Miron et la musique d’Antonin Dvorak ont été mariés dans une série de trois pièces. Fait exceptionnel, la rencontre s’est conclue sur la présentation de Traversée, extrait d’une courte pièce écrite par Rosie Belley.
Musicalement, aux traditionnels violons et piano s’est ajouté l’étonnant Handpan. Philippe Gagné s’est servi de cet instrument d’invention récente, sorte de moule fermé et circulaire fait de métal, aux sons très mélodieux, pour interpréter une de ses propres compositions. Sara Dewhurst, étudiante en première année en musique, a quant à elle chanté l’une de ses propres compositions, en s’accompagnant au piano. La musicienne juge l’exercice à la fois agréable et pertinent : « Tout le monde est égal, et tout le monde amène quelque chose d’unique. »
Tous, c’est évident, participent de bon cœur à l’activité, comme le prouve le retour, événement après événement, de nombreux habitués. Et si le public y trouve son compte, les étudiants, très reconnaissants envers les organisatrices, en retirent aussi beaucoup. Pour Rosie Belley, outre le côté « pratique », les musico-poétiques sont aussi une source de découvertes et d’inspiration. « Ça donne des idées! Des idées de collaboration pour des spectacles, pour de nouvelles créations », dévoile-t-elle.
Quant à Chantal Masson-Bourque et Denyse Noreau, elles défendent l’événement avec une passion toujours aussi grande. « Les étudiants sont très généreux et stimulants. Ils nous accordent beaucoup de plaisir et de bonheur », conclut l’enseignante en théâtre. Les spectateurs présents pourraient en dire autant.
Le prochain mercredi musico-poétique aura lieu en février, de 16h30 à 17h30, à la salle Henri-Gagnon. L’activité est gratuite.