Impact Campus a discuté avec Sylvie Nicolas qui publiait, le 13 septembre dernier, son tout dernier ouvrage Le cri de La Sourde et autres marées aux éditions Druide. Celui-ci s’inscrit dans la suite du travail qu’elle a effectué au doctorat en création littéraire à l’Université Laval.
Ce roman n’est pas le premier pour l’auteure, bien connue du milieu littéraire. Outre la trentaine de titres, dont une quinzaine pour la jeunesse, la poète et traductrice littéraire a été deux fois finaliste au Prix du Gouverneur général et était, en 2013, la première lauréate du prix Jean-Noël-Pontbriand, créé par le Printemps des poètes et l’Université Laval. Malgré tout, Sylvie Nicolas, ce n’est pas que des textes, des prix, des traductions littéraires. Non. C’est une grande personne, petite en dedans, qui chante encore, malgré la pluie qui tombe.
Dès les premières pages de son ouvrage, l’univers bien senti de Sylvie Nicolas s’impose au lecteur. Les fragments d’histoires, teintés d’intuitions, laissent place à des protagonistes tous plus intéressants les uns que les autres. Que ce soit le Cordonnier-pas-de-pattes, La Pipi, Barthélémy ou encore La Sourde qui évoluent au rythme des marées de la Matanie, les silences et les non-dits tentent de refaire vivre les souvenirs ancrés au loin. Dans cet ouvrage, l’histoire des Surlilois est empreinte de mystère, ce qui transforme les souvenirs et les fragments de mémoires en une sorte de fable.
Oui, mais, pourquoi j’écris?
L’auteure, qui n’a pas le syndrome de la page blanche, avoue toutefois avoir fait face à un tout autre défi qui l’a menée à reprendre ses études. Elle a dû se rendre jusqu’au doctorat pour enfin trouver la réponse à la question qui la tenaillait depuis quelque temps : pourquoi j’écris et pourquoi continuer à écrire? Dans sa période de questionnement, l’auteure a même évalué la possibilité «de trouver un endroit pour vendre du pain quotidien aux gens heureux d’acheter du pain quotidien ».
Heureusement, elle a su saisir la main tendue d’Alain Beaulieu, son directeur de maîtrise et de doctorat. C’est avec une grande reconnaissance qu’elle mentionne : « Il y a le avant et le après Alain Beaulieu, j’ai été privilégiée de l’avoir comme directeur en création à la maîtrise et au doctorat. » Celui-ci a su la lire, l’entendre et la guider. «Ça m’a permis, le doctorat, non seulement de mieux comprendre pourquoi j’écris, mais surtout de vouloir continuer à écrire, ce que je n’avais plus auparavant. », mentionne-t-elle.
Ainsi guidée, Mme Nicolas a découvert ce qui la liait réellement à l’écriture et a pu ainsi éviter de s’échouer comme le chaland de Barthélémy, un de ses protagonistes. Son écriture, fragmentée et fragmentaire, était intimement liée à son rapport avec sa propre mère. « Je suis allée vérifier comment j’écris et pourquoi j’écris de cette façon-là. Ma mère parlait par petits bouts pas du tout suivis dans le temps et j’ai une tendance à l’écriture qui est comme ça. », affirme-t-elle.
Au gré du silence
Dans cet ouvrage, les figures féminines de la mère, de la grand-mère et de la fille tissent une fabuleuse histoire de souvenirs filiaux. Il faut comprendre que Sylvie Nicolas, issue du milieu théâtral, est d’abord une poète. Son écriture doit se lire au gré des marées et le lecteur n’a d’autre choix que de se laisser porter par elles. « Chaque page de ce livre est mon pays. Ceux et celles qui le traversent sont d’éternelles marées. Ils ont déversé en moi l’eau salée qui coule dans mes veines », écrit-elle.
Plonger dans Le cri de La Sourde et autres marées, c’est se faire prendre par la main, filer d’est en ouest à travers le Canada et poser son regard sur des fragments de souvenirs, tantôts inventés, tantôts réels, qui, collés les uns aux autres, empêchent les souvenirs de s’effacer. « Ce livre se veut une sorte de géographie des voix qui se perdent, des silences qui s’entendent et de tous les cris que nous peinons à entendre »; ainsi décrit-elle son roman. Le petit, grand monde qui habite cet ouvrage-là transporte le lecteur au cœur du silence, mais d’un silence qui ne se lasse pas de dire.
Le lancement du roman aura lieu mercredi le 27 septembre prochain à la Librairie La Liberté.