Avec une phase 4 qui s’était effondrée sous le poids d’Avengers en perte de vitesse et une phase 5 incapable de retrouver le rythme, le plan du MCU avait sérieusement du plomb dans l’aile. Heureusement, le succès de Thunderbolts et l’annonce de The Fantastic four : first steps pour lancer la phase 6 ont rallumé la curiosité du public. Voilà que nos quatre héros se retrouvent face à une menace venue d’un autre univers : le Superman de James Gunn qui annonce le comeback fracassant du DCEU.
Par Léon Bodier, journaliste multimédia
« You have a flying saucer, but you couldn’t get a faster garage door? »
Malgré les cheveux d’Aquaman (qui continuent de hanter mes cauchemars), il faut reconnaître que les deux géants de l’industrie savent manier le VFX. De fait, le public attend un niveau de spectacle devenu synonyme de films de super-héros… alors comment le surprendre encore ? Cette fois, Superman et The Fantastic Four ont eu la même idée, et c’est un strike : le costume vintage du Kryptonien et le laboratoire rétro-techno de Mister Fantastique jouent la carte de la nostalgie. En 2025, c’est un style comics old school qui revient à la vie. Tendance passagère ou nouveau cap ? Le MCU mise sur une production résolument nostalgique malgré son futurisme assumé. Un méta-modernisme flamboyant qu’il serait étonnant de ne pas voir s’imposer dans la phase qui commence.
« Super… ‘man’. He’s not a man. He’s an it. A thing with a cocky grin and a stupid outfit, that’s somehow become the focal point of the entire world’s conversation. »
Une prime est de mesure pour les directeurs de casting des deux productions. Difficile de savoir si les personnages ont été écrits pour les acteurs ou si les acteurs sont nés pour les interpréter. Les deux attirent le regard, et incarnent leur rôle avec justesse. Mais, là où ils impressionnent, les deutéragonistes en déçoivent d’autant plus.
Au MCU, les nouveaux venus souffrent d’un développement narratif qui s’effiloche au fils des actes. Aucun blâme aux acteurs, certains se battent même vaillamment contre des choix de costumes discutables (Joseph Quinn et ses lentilles bleus l’empêchant de pleurer devant sa sœur morte), mais chacun des acolytes finit par tourner en rond : Sue Storm réduit à son rôle de mère, Ben Grimm s’efface dans une amourette inexistante, et la Torche Humaine troque de son sarcasme pour devenir linguiste. Une intelligence rafraîchissante (absente des films avec Chris Evans, pourtant logique vu qu’ils sont tous astronautes), mais qui manque d’une écriture assez fine pour émouvoir. Alors que Justice League avait été détruit pour ses personnages bidimensionnels, la personnalité de Mister Fantastique, censé remplacer Tony Stark à la tête du MCU, ne charme pas autant que notre regretté Iron Man. En face, un Superman désexualisé (et oui pas une scène shirtless) lutte entre sa mission, son instinct et ses racines ; un conflit intérieur pour une évolution intéressante du personnage, tranchant nettement avec le manichéisme des Fantastiques.
« I herald his beginning. I herald your end. I herald Galactus »
Fini le nuage noir des films précédents : Galactus prend enfin l’ampleur d’un titan dévoreur de planètes… mais sans la moindre contextualisation et profondeur, s’appuyant sur Shalla-Bal, épouse du Silver Surfer version 2007, pour justifier ses ambitions inter-univers. Heureusement que Julie Garner illumine le casting, car son jeu sauve ce scénario qui réduit le conflit à la sauvegarde d’un bébé innocent face à une incarnation cosmique de la mort.
Mais, même-là, impossible d’arriver à la cheville du mégalomane de James Gunn interprété par Nicolas Hoult. Plutôt que de ressasser la rengaine du pouvoir médiatique contre le super-héros hors-la-loi, il l’envoie à l’assaut du journal de 20h par pur ego. Ce Lex Luthor sait qu’il ne peut pas vaincre Superman ; il préfère donc s’affairer un peu inutilement contre son némésis qui a d’autres chats à fouetter ; et c’est très fun. L’acteur sait exactement quel ton prendre, et son narratif se marie très bien au rythme du film ; son enfantillage philanthropique ajoute une touche d’humour bienvenue.
Si Gunn continue sur cette lancée, lui et son chien pourraient bien ressusciter le DCEU après deux décennies de coma scénaristique. Pendant ce temps, le MCU semble toujours incapable de comprendre que ce que le public aime, ce sont des personnages nuancés. Le retour annoncé de Robert Downey Jr. dans les Avengers est-il la preuve qu’aucun héros ne peut remplacer Tony Stark ? Pourquoi ne pas investir ce temps et cet effort dans la construction de nouveaux protagonistes tout aussi riches ?
Parce que pour l’instant, entre un Superman qui prend des risques narratifs et des Fantastiques qui carburent à la nostalgie sans trop de profondeur, la balance semble pencher pour la première fois dans l’autre sens.