La salle Louis Fréchette n’était pas pleine, loin s’en faut, lorsque le célèbre chanteur cajun est finalement monté sur scène, vers 20 h 45. Un parterre aux trois quarts plein et des balcons presque vides ont accueilli le Louisianais. Devant l’intensité des applaudissements, cependant, on se serait cru dans une salle comble. Et les gens présents ont eu droit, indéniablement, à un grand spectacle.
Entouré de trois musiciens (Sylvain Quesnel à la guitare et à la basse, Justin Allard à la batterie et Éric Sauviat aux guitares), Zachary Richard a entamé le spectacle avec une interprétation endiablée de Laisse le vent souffler, issue de son dernier album, Le Fou, paru en octobre. Un excellent album, comme toujours, dont l’artiste a interprété près d’une dizaine de titres. La foule, dont une partie était apparemment peu familière avec ces nouvelles créations, a cependant été lente à s’échauffer, et ce malgré de solides prestations, tant de la part du chanteur que de ses talentueux accompagnateurs. Les premiers moments du spectacle ont néanmoins donné lieu à quelques moments cocasses, comme lorsqu’un Zachary Richard faussement sérieux a aboyé un retentissant « calmez-vous! », alors même qu’il interprétait son classique Au bord du lac Bijou… Il faut dire que la foule ravie avait profité d’un ralentissement de tempo pour éclater en applaudissements!
Toujours touchant et sensible dans ses discours, celui qui partage sa vie entre les États-Unis et le Québec a tenu à souligner la victoire de Barack Obama aux élections de mardi dernier, dédiant dans la foulée sa Ballade de Jean Saint-Malo à tous ceux qui luttent pour la liberté, partout dans le monde. Tantôt grave, tantôt drôle, Zachary Richard s’est montré excessivement généreux, glissant plusieurs de ses succès parmi ses nouvelles chansons : un émouvant Cap Enragé et un Petit Codiac débridé ont ainsi côtoyé des pièces comme Le Fou et Clif’s Zydeco — des classiques en devenir, à n’en pas douter! Marqué par de renversantes performances musicales — les trois compagnons du chanteur, virtuoses, semblaient prendre un énorme plaisir à être sur scène —, le spectacle a atteint des sommets lorsque la foule tout entière s’est levée pour la traditionnelle et hilarante danse de l’écrevisse, alors qu’un Zachary Richard souriant chantait Crawfish à pleins poumons et invitait les spectateurs à faire montre de leurs talents vocaux. Le chanteur cajun a ensuite conclu, accordéon en main, sur une dernière pièce débordante d’énergie.
À la suite de plusieurs salves d’applaudissements bien nourris, le Louisianais est revenu sur scène seul avec sa guitare. Après avoir interprété, dans un silence presque religieux, la touchante Chanson des Migrateurs, Zachary Richard a été rejoint par ses musiciens et a enchaîné avec l’une des plus belles pièces de sa nouvelle offrande, Orignal ou Caribou. Alors que les dernières mesures semblaient vouloir s’étirer longuement, la musique a peu à peu changé de rythme, suscitant les acclamations du public : La Ballade de Jean Batailleur est ainsi venue clôturer une prestation puissante, aussi touchante qu’énergique, et ponctuée de doux instants de folie.
Nathan Murray