15 films en langues étrangères

Tout d’abord, je tiens à expliquer ce que j’entends par films en langue étrangère : ce sont tous des films qui ne sont pas en anglais ou en français. En 2020, pour la première fois de l’histoire des Oscars, un film non-anglophone a remporté l’Oscar du Meilleur film (en 92 cérémonies), et c’est le film du Coréen Bong Joon-ho (ce film, même s’il ne fait pas partie de ma liste, est définitivement à voir). Ce réalisateur crie sur tous les toits l’importance de s’ouvrir aux films étrangers, qu’une fois dépassé la barrière des sous-titres, on peut découvrir des merveilles. C’est bien sûr une opinion que je partage profondément.

Par Marc-Antoine Auger, journaliste collaborateur

Ali : Fear Eats the Soul
Commençons la liste avec une très belle histoire d’amour réalisée par l’Allemand Rainer Werner Fassbinder, un réalisateur à la carrière très courte mais néanmoins extrêmement prolifique. Le film est sorti en 1974 et on y suit l’idylle qui se développe entre un homme au début de la quarantaine et une femme d’environ 65 ans. Fassbinder est décédé à l’âge précoce de 37 ans, ça ne l’a pas empêché de faire une quarantaine de films, des téléfilms, des pièces de théâtre où il aborde souvent des thématiques marginales. C’était un réalisateur très en avance sur son temps, et pour cette raison il mérite qu’on s’attarde sur son travail.

Cell 211
On suit dans ce thriller espagnol sorti en 2009 l’histoire d’un employé nouvellement engagé dans une prison. À son tout premier jour de formation, il se ramasse en plein milieu d’une émeute des prisonniers, il s’évanouit, et lorsqu’il se réveille, il doit faire croire aux autres qu’il est un détenu comme eux pour sauver sa peau. On est rapidement happé par le récit et le jeu des acteurs incroyablement convaincant. On est tenu sur le bout de notre chaise tout au long du film, c’est un excellent thriller.

Spring, Summer, Fall, Winter… and Spring
Enchaînons avec un film coréen réalisé par Kim Ki-duk sorti en 2003. On suit l’histoire d’un moine bouddhiste à différentes étapes de sa vie, de son enfance jusqu’à un âge avancé. C’est très poétique comme film, les décors dans lesquels le film est tourné sont extrêmement enchanteurs, c’est une belle méditation sur la vie. Ce réalisateur en est définitivement un autre à découvrir.

Victoria
Ce film allemand sorti en 2015 et réalisé par Sebastian Schipper a la particularité d’être filmé en une seule prise. Le film dure 2h18, et c’est réellement un plan-séquence qui dure tout le long du film. Non seulement le film est une prouesse au niveau technique, mais l’intrigue est également bien ficelée, le jeu des acteurs et actrices est très naturel et convaincant. C’est un film à mi-chemin entre histoire d’amour et thriller. C’est un trésor caché à découvrir absolument.

Scenes from a Marriage
Dans un numéro du magazine paru à l’automne 2019, j’avais abordé Bergman, et ayant la mort comme thématique, je n’avais donc pas parlé de ce film. Bergman y met en scène un couple à différentes étapes de sa vie conjugale. Les deux acteurs principaux, Erland Josephson et Liv Ullmann, interprétant respectivement Johan et Marianne, y vont de deux performances magistrales. Ils portent le film entièrement sur leurs épaules. C’est le film le plus long de la liste : sa version écourtée pour le cinéma dure 167 minutes, mais il prend également la forme d’une mini-série de 6 épisodes qui dure quant à elle 281 minutes. J’ai vu la mini-série, pas le film, et je n’ai pas vu le temps passer deux secondes. Une des nombreuses merveilles du grand cinéaste suédois.

Rafiki
Le titre du film signifie « ami » en swahili. On y suit l’histoire de deux jeunes femmes à Nairobi, elles développent une amitié malgré le fait que tout les oppose, leurs pères étant des adversaires idéologiques dans une campagne politique de la capitale kenyane. Cette amitié se transformera éventuellement en histoire d’amour dans une ville marquée par le conservatisme et les préjugés envers les communautés LGBTQAI2+. Ce film gagne grandement à être connu, il est banni au Kenya et a été ovationné à Cannes en 2018. Il a marqué l’histoire du festival en devenant le premier film du Kenya à y être présenté dans une quelconque catégorie. Il est réalisé par une femme du nom de Wanuri Kahiu

Living Is Easy With Eyes Closed
En ces temps d’isolement et de déprime, il fait bon de voir un film joyeux qui ragaillardit le public, et ce film en est un extraordinaire. On y suit l’histoire d’un professeur en Espagne qui, en 1966, décide de faire un roadtrip pour aller rencontrer sa plus grande idole, John Lennon, présent en Espagne à ce moment-là pour un tournage. Notre professeur décide sur son chemin de ramasser deux auto-stoppeurs. Nos trois amis, qui ne se connaissent ni d’Ève ni d’Adam à leur rencontre, vont éventuellement développer une amitié très touchante. Cette oeuvre espagnole parue en 2013 et réalisée par David Trueba est une histoire vraie.

Underground
Cette comédie dramatique réalisée par le Serbe Emir Kusturica avait remporté la Palme d’Or en 1995. Underground raconte l’histoire de deux amis, Marko et Peter « Blacky », que l’on suit de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à la Guerre civile touchant la Yougoslavie au début des années 90. Au tournant des années 60, Marko devient un conseiller proche de Tito, dictateur en place à l’époque, tandis que « Blacky » est coincé dans un sous-sol, convaincu par Marko que la Deuxième Guerre mondiale fait encore rage. Ce long-métrage nous plonge dans un monde qui semblait être éternellement en guerre. Malgré la lourdeur du propos, c’est un film qui offre malgré tout des moments drôles, presque burlesques et d’autres touchants. La musique confère au film une ambiance vraiment singulière, elle est très colorée, un peu déstabilisante pour quelqu’un qui n’est pas habitué, mais elle rend le film vivant, très stimulant.

La Dolce Vita
Je vous suggère ici une autre Palme d’Or, celle-ci réalisée par le grand cinéaste italien Federico Fellini. Un film révolutionnaire de par sa structure narrative très originale, on y suit l’histoire de Marcello Rubini (Marcello Mastroianni), un journaliste à potins vagabondant à travers Rome et sa quête infructueuse de bonheur et d’amour. La Dolce Vita a fait un petit assez récemment ; le film La grande bellezza (The Great Beauty) qui a remporté l’Oscar du Meilleur film en langue étrangère en 2014 est un hommage au film de Fellini. Nombre des films de ce réalisateur sont à découvrir, je pense entre autres à La Strada, Nights of Cabiria, 8 1⁄2, et d’autres.

Lady Snowblood
Vous avez aimé Kill Bill de Quentin Tarantino ? Vous allez adorer ce film-là. C’est un classique du cinéma japonais sorti en 1973 qui met en scène femme voulant obtenir vengeance auprès d’un groupe de bandits qui ont tué son père et violé sa mère. L’actrice principale, du nom de Meiko Kaji, chante la chanson-thème du film que l’on peut entendre également dans Kill Bill. La violence est exagérée dans le film, on reconnait bien là les influences de Tarantino. Un film d’action à découvrir, quiconque aimant l’œuvre de Tarantino doit s’ouvrir à ce long-métrage japonais réalisé par Toshiya Fujita.

A Separation
Dans ce film iranien réalisé par Asghar Farhadi, nous suivons la vie d’un couple en instance de divorce, et les répercussions que le processus a sur leur jeune fille. Ce sont de magnifiques performances de la part des acteurs principaux. Sans dévoiler de spoiler, le film nous laisse sur une note magnifique à la toute fin. Farhadi avait remporté l’Oscar du Meilleur film en langue étrangère en 2012 pour ce film, et il a répété l’exploit pour son film The Salesman cinq ans plus tard. C’est un réalisateur à découvrir. D’autres de ses films se sont démarqués à l’étranger, je pense entre autres à About Elly, sorti en 2009. Ces trois films sont tous empreints d’une grande vérité, les acteurs y sont toujours très convaincants et naturels.

Strawberry and Chocolate
Cette co-production cinématographique de Cuba et du Mexique réalisée par le Cubain Tomas Gutierrez Alea raconte l’histoire d’une amitié qui se développe, contre toute attente, entre Diego, un électron libre, artiste homosexuel très critique à l’endroit du régime de Castro, et David, un étudiant rempli de préjugés à l’endroit des gais. C’est un film très touchant, avec de très belles performances de la part des deux acteurs principaux. La fin du film est magnifique de par sa simplicité. D’une certaine manière, c’est une métaphore qui en dit long sur nos deux personnages. Ce film de 1994 est un classique du cinéma cubain.

 

In the Mood for Love
Ce film d’amour chinois réalisé par Wong Kar-wai est à des milles de tous les films d’amour qui se font en Occident, et c’est exactement pour ça que c’est un chef-d’œuvre. Nos deux personnages principaux, interprétés par Maggie Cheung et Tony Leung, dans deux des plus belles performances que j’ai vues dans ma vie, réussissent à nous convaincre de la profondeur de leur amour en se touchant à peine pendant toute la durée du film. Qu’il n’ait pas remporté la Palme d’Or en 2000 (sans rien enlever à Dancer in the Dark de Lars Von Trier) me surprend encore à chaque fois que je pense à lui. Sans être un adorateur des films d’amour, il est intéressant de s’attarder à celui-ci justement pour son originalité. Souvent cité comme l’un des meilleurs films du 21e siècle ou encore du cinéma asiatique, c’est définitivement un classique à découvrir.

Black Sunday
Changeons de style un peu. Black Sunday est un classique de l’horreur italien sorti en 1960 et réalisé par Mario Bava. Le film débute sur la mise à mort d’une sorcière par un groupe de fanatiques. 200 ans plus tard jour pour jour, on se retrouve sur les lieux exacts où cette mise à mort s’est déroulée, et où d’ailleurs un manoir est construit. Les occupants de ce manoir vont désormais faire face à une menace invisible. Les influences gothiques sont omniprésentes dans le film : ambiance glauque à souhait, mise en scène et décors magnifiques et convaincants pour un film d’époque.

Ikiru
Un de mes films préférés d’un de mes réalisateurs préférés, ce film est une pure merveille. Ce drame psychologique qui a pris l’affiche en 1952 et réalisé par un maître du cinéma japonais, Akira Kurosawa, raconte l’histoire d’un vieil homme qui a passé sa vie à travailler comme bureaucrate, il n’a jamais manqué une journée de travail, et tout d’un coup, un matin, il ne se présente pas, lorsqu’il apprend qu’il a une maladie incurable. Ce film est d’une grande profondeur, Takashi Shimura dans le rôle principal offre une performance des plus saisissantes. « Ikiru » signifie « vivre » en japonais. La direction photo du film est très belle, et la fin est mémorable. Difficile de croire que Kurosawa n’était âgé que d’un peu plus de 40 ans lorsqu’il a réalisé ce film si touchant et convaincant sur la mort d’un vieil homme. Nombre des films de ce réalisateur sont à découvrir, je pense entre autres à Seven Samurai, Yojimbo, Throne of Blood, Rashomon, pour ne nommer que ceux-là.

 

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