Dans le cadre de la Journée mondiale de la liberté de la presse, l’Office national du Film (ONF) présente Un journaliste au front de Santiago Bertolino dès le 3 mai en salle.
Après avoir réalisé Carré rouge sur fond noir en 2012, le cinéaste Santiago Bertolino offre un tout nouveau documentaire engagé. Ce dernier suit le parcours du journaliste canadien Jesse Rosenfield au Moyen-Orient de 2013 à 2016, et ce, à travers 10 voyages dans cinq pays. « Dans Un journaliste au front, mon engagement social s’exprime par le choix de mon personnage, un reporter pigiste qui pratique une forme de journalisme effectivement plus engagé que ce qu’on a l’habitude de lire dans la presse mainstream. » Dans ce monde en pleine mutation, le film traite des hauts et des bas d’un journaliste pigiste en pleine zone de guerre.
Comprendre la pratique journalistique
Le long-métrage offre un véritable point de vue de l’intérieur sur le métier de reporter à l’étranger. À titre d’exemple, le financement et la compétition parmi les autres médias sur le terrain constituent deux contraintes importantes pour un journaliste pigiste.
« Un journaliste indépendant, c’est un journaliste qui n’est pas salarié. Il est libre, il travaille à la pige. Il a la possibilité d’écrire les articles qui le motivent réellement, il n’a pas de patron. C’est une situation enviable parce qu’il n’a pas de rédacteur en chef qui lui dicte ses sujets, mais, en contrepartie, il n’a pas de bonnes conditions de travail, il doit vendre ses papiers à la pièce, il n’a pas de rémunération fixe et aucun employeur n’est responsable de lui. S’il lui arrive quelque chose, il doit se débrouiller par lui-même. Il est plus vulnérable. »
Santiago rappelle surtout la nécessité d’avoir des correspondants sur le terrain qui permettent au public de connaître ce qui se passe dans le monde, mais aussi d’apporter des nuances au fil de nouvelles diffusé par les grandes agences de presse.
Les enjeux chauds du Moyen-Orient
De l’Égypte à la Turquie, puis en Irak, en passant par Israël et la Palestine, le documentaire montre en filigrane l’implosion du Moyen-Orient après le printemps arabe. Le film aborde des sujets sensibles tout en faisant intervenir des acteurs variés sur le terrain : la question des réfugiés kurdes, les attentats de l’État islamique et la guerre israélo-palestinienne en sont des exemples.
Scène après scène, Santiago et Jesse se rapprochent toujours plus du danger dans leurs aventures au point même de risquer leur vie. Munis d’un gilet pare-balles et d’un casque, ils rappellent le risque constant de travailler au front d’une zone de conflit.
« Il s’agit de films « expériences », dans le sens où je veux que le public puisse s’identifier aux personnages, vivre avec eux les défis qu’ils surmontent, entrer dans leurs aventures humaines et mieux comprendre les idéaux qu’ils défendent. »
Encore une fois, le documentaire se montre engagé par sa conclusion. À la toute fin, on sent bien que le journaliste canadien veut conscientiser le public au fait que tous les grands enjeux sociopolitiques de l’heure sont liés aux interventions des pays occidentaux.
Un énorme défi technique
Polyvalent, Santiago rappelle tout le travail derrière ce projet d’envergure. « J’ai donc travaillé en homme-orchestre la majeure partie du temps. Je cumulais les postes de réalisateur, de caméraman et de preneur de son. »
En plus, certaines personnes se montrent hostiles envers les deux hommes lors des entrevues, leur refusant même l’accès à l’information. C’est notamment le cas en Palestine où il n’a tout simplement pas pu entrer, puisque de lourdes restrictions s’imposent aux journalistes. Le cinéaste souligne également l’importance de préserver l’anonymat des informateurs.
Pour terminer, Santiago encourage les futurs documentaristes à se lancer dans ce milieu qui reste extrêmement passionnant malgré les défis de taille. Pour lui, une bonne école de cinéma et une jolie plume sont la clé pour rédiger un scénario prometteur.