Neige et idéologies

«Ah! Comme la neige a neigé!» – Émile Nelligan

De nos jours, il n’est plus besoin de regarder par son « jardin de givre » pour être conscient qu’il neige. Un seul coup d’oeil sur sa fenêtre numérique débordante des « spasmes de vivre » en terre nordique permet de confirmer la chose. Chaque tempête, voire même la moindre bordée, voit les réseaux sociaux s’enflammer contre le froid et la neige.

Pourtant, cette neige, ce froid, ne nous ont-ils pas façonnés en tant que peuple? Et ce, bien avant que l’embourgeoisement généralisé de notre société québécoise n’amène son lot de reniements, inévitable à toute ascension sociale, et qu’il devienne possible d’aller « s’encanailler » dans des pays du Sud. Nous sommes un peu comme ces nouveaux riches qui font mine de ne pas reconnaître leurs anciens amis d’infortune. Car l’hiver ne fut-il pas justement l’ami de nos humbles débuts?

Avant d’inventer des expressions aussi colorées que « marde blanche », notre hiver n’a-t-il pas aussi inspiré les poèmes d’Émile Nelligan? N’est-ce pas l’hiver, encore, qui posait nu dans l’atelier du grand Suzor-Côté?

Enfin, l’hiver nous a protégés des débordements de la nature humaine souvent cachés sous le fard des idéologies. N’est-il pas étonnant que le Québec, avec son peuple de vaincus, n’ait jamais succombé à la tentation des idéologies plus extrême de droite ou de gauche?

Peut-on imaginer que Cuba aurait encore un système communiste si l’île avait connu un hiver tel que le nôtre ou même simplement d’un quart du nôtre? La réponse est évidemment non. D’abord, si le régime ne connaît pas les précipitations de neige, il dépend fortement des précipitations de dollars qu’entraîne l’arrivée des snowbirds. Un oiseau dont on n’apercevrait plus le plumage à La Havane si l’hiver devait aussi y avoir droit de cité. L’inefficacité communiste n’aurait d’ailleurs jamais su faire face au cauchemar logistique qu’aurait représenté la gestion de système de chauffage étatisé. Ne parlons même pas de déneigement.

Ronald Reagan ou la course aux armements ont volé le mérite de l’hiver russe qui a terrassé l’URSS.

C’est encore cet hiver russe, si semblable au nôtre, qui a écrasé les troupes nazis d’Adolph Hitler. N’oublions jamais ça.

Enfin, à chaque tempête, souvenons-nous toujours de cette phrase lorsque nous pensons à l’hiver : « Because he’s the hero Gotham deserves, but not the one it needs right now. So we’ll hunt him because he can take it. Because he’s not our hero. He’s a silent guardian, a watchful protector. A dark knight. »

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