Photo : Elia Barbotin

Compensation financière : les futurs enseignants s’approchent du but

Une grande journée de grève étudiante, avec plus de 15 000 étudiant(e)s stagiaires indignés, sera finalement parvenue à avoir un impact concret à l’Assemblée nationale. Les futurs enseignants québécois sont en train de livrer un beau message à notre gouvernement : un stage qui demande une implication à temps plein, c’est plus qu’une activité de formation. C’est un travail, et ça se paie.

Force est d’admettre que la grande manifestation contre les stages non-rémunérés du 10 novembre dernier, à Montréal, a changé beaucoup de choses en fait. Plus que le rassemblement d’un seul domaine, l’événement a réuni des futur(e)s enseignant(e)s, mais aussi des futur(e)s infirmier(e)s ou des futur(e)s travailleur(euse)s social(e)s.

On sent que le combat des stagiaires au Québec en est réellement à un point d’ancrage important, dans le contexte où la ministre de l’Enseignement supérieur, Hélène David, a enfin admis réfléchir à une compensation financière pour la première fois la semaine dernière. L’été dernier, cette même ministre David avait catégoriquement fermé la porte. Son argument à l’époque ? L’État québécois « ne paie pas les gens en formation ».

Mais parle-t-on vraiment de formation ici ? Le stage 4 en enseignement, ce sont des dizaines d’heures en classe à corriger des copies, à surveiller des jeunes, à donner des cours complets, puis à s’impliquer corps et âme dans ce qui est en fait déjà un travail. Ne pensez-vous pas que la « formation », elle se donne avant le stage final, pendant le bac ?

Que pensait la politicienne en fermant d’abord toutes les options? « Si cette réponse visait à donner une douche froide au mouvement, encore à ses premiers balbutiements, la ministre, bien malgré elle, nous a plutôt encouragés à hausser le ton dans notre lutte », dit Mircea Adamoiu, un étudiant en enseignement à l’Université de Montréal, via le HuffPost Québec, section blogues.

C’est bien vrai. Sans le savoir, la ministre a peut-être jeté de l’huile sur le feu.

De l’action

Les politiciens ont pour la plupart de bonnes intentions, mais leur distance par rapport à certains enjeux les empêche parfois de voir la réalité avec objectivité. Il faut savoir les informer et les influencer pour les obliger à bouger.

Les doctorants en psychologie, eux, ont réussi l’exploit il y a quelques mois déjà : 25 000$ de bourses pour leur doctorat qui s’étale sur plus de cinq ans. Un grand pas pour le futur en santé mentale au Québec, d’ailleurs, si on voit plus large.

Si c’est nécessaire, ça prendra d’autres grèves, des boycotts massifs de stages, des actions de représentation, une promotion médiatique intensive. Oui, il se peut que ça prenne encore pas mal d’efforts pour convaincre certains éternels sceptiques au gouvernement en place.

Jusqu’au bout

Des centaines d’heures pour obtenir un diplôme qui ne garantit pas, au final, un emploi à la sortie des bancs universitaires. À l’Université Laval, 950 heures doivent être accomplies en moyenne (gratuitement, on le rappelle) pour avoir le fameux diplôme. Ailleurs dans d’autres programmes, le constat est le même, dès le collégial même.

Pourquoi demander à des étudiants motivés et passionnés par ce qu’ils font de s’endetter, mais surtout de s’exposer à des conditions de stress épouvantables ? La détresse étudiante, ça existe, et encore plus dans des programmes où on impose une telle vulnérabilité.

C’est un enjeu d’égalité salariale dont on parle ici, dans une perspective bien plus grande qu’étudiante ou propre à un campus.

Heureusement, tout ça survient aussi dans un beau contexte. Le Québec est en train de restructurer la manière dont il finance ses groupes communautaires. C’est le moment ou jamais de demander des refontes précises à l’État, de changer la donne en matière de priorités gouvernementales.

Même la ministre David le reconnaît : c’est toute une question nouvelle qui mérite réflexion. Ne reste plus qu’à le faire intelligemment, ensemble, vers une meilleure compréhension de ce qu’est vraiment la réalité des stagiaires non-rémunérés.

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