Les pathogènes émergents ont été analysés sous toutes leurs coutures dans le cadre du 2e symposium de l’Association québécoise pour l’innocuité alimentaire (AQIA), qui réunissait jeudi dernier des chercheurs et industriels de l’alimentation préoccupés par la sécurité alimentaire.
Les travaux de la Dre Lee-An Jaykus ne pouvaient être plus à propos. Pour cette chercheure de la North Carolina State University, les changements climatiques sont bel et bien en cours et leurs conséquences néfastes se font déjà sentir. Dans une conférence sur «l’effet des changements climatiques sur l’écologie microbienne et l’innocuité alimentaire», Dre Jaykus s’est attardée à nous démontrer la corrélation existant entre ce phénomène climatique mondial, la perturbation du cycle de l’eau et la contamination alimentaire.
Dans un premier temps, la modification des patrons de précipitation et la variation des températures de l’eau sont propices à la colonisation de nouveaux territoires par des pathogènes. Par exemple, les épidémies de choléra apparaissent maintenant dans des régions jadis intouchées et, sachant que la bactérie causant cette maladie préfère les températures plus clémentes, un lien de cause à effet a pu être établi entre l’augmentation de la température de l’eau et l’apparition de ces épidémies. Ensuite, l’augmentation du nombre et de la force des catastrophes naturelles contribue à relocaliser des populations entières, qui doivent par la suite s’entasser sur un territoire restreint. Cette promiscuité est propice à une contamination de l’eau, principalement par des matières fécales, pointe Dre Jaykus. Considérant que l’eau est utilisée pour abreuver le bétail et pour arroser les champs, tout ce qui rend l’eau insalubre contamine potentiellement les sources alimentaires de l’humain.
Pathogènes et soins de santé
Les virus étaient également sous la loupe des participants du symposium, avec une conférence présentée par la Dre Julie Jean, professeure à l’Université Laval et présidente de l’AQIA. «Les pathogènes dans les aliments sont une préoccupation importante compte tenu de tous les coûts en soins de santé qu’ils engendrent et des pertes économiques causées par les retraits d’aliments», a-t-elle fait valoir. Une récente étude américaine a estimé à 9,4 millions le nombre annuel total d’intoxications alimentaires aux États-Unis, entraînant par le fait même le décès de plus de 56 000 personnes à chaque année. Dre Jean a indiqué que, bien que les bactéries aient longtemps été montrées du doigt comme étant la cause de nombreuses intoxications, – pensons entre autres à la listériose ou «la maladie du hamburger», causée par E. coli – , les chercheurs savent depuis environ 10 ans que ce sont plutôt les virus qui sont responsables de 59% des cas d’intoxication alimentaire.
Selon Mme Jean, la fertilisation, la récolte ou la manipulation des aliments préparés ouvrent grand la porte à l’introduction de ces virus dans la chaîne alimentaire. Des précautions accrues seraient donc à prendre afin de limiter le nombre de contaminations. Parmi ces mesures, elle mentionne de laver et de cuire plus soigneusement les aliments, de même que de désinfecter les surfaces et objets avec de l’eau de Javel diluée lorsqu’un membre de la famille est atteint d’une intoxication alimentaire.
Les conférenciers ont été nombreux à mentionner que les médias font souvent leurs choux gras des défaillances dans le système de contrôle de salubrité des aliments. Tous s’entendaient pour dire qu’il est crucial de tempérer ces vents de panique inappropriés et que le meilleur moyen pour y parvenir est de tenir la population plus adéquatement renseignée.