D’ici 2020, la rivière Romaine alimentera quatre barrages hydroélectriques gérés par Hydro-Québec. Ce courant d’eau de la Basse-Côte-Nord trouvant sa source au Labrador et se déversant dans le Golfe du Saint-Laurent sera transformé en une série d’immenses bassins artificiels, créant l’inondation d’une partie du territoire et l’assèchement de la rivière par endroits.
C’est à l’été 2008 que les deux réalisateurs du documentaire Chercher le courant, Alexis de Gheldere et Nicolas Boisclair, ont descendu en canot les 500 kilomètres de la Romaine en 46 jours, en compagnie de deux environnementalistes. Ils ont filmé leur périple pour faire découvrir la beauté de la rivière, avant que soit entamée la construction du premier barrage. «Il fallait se pincer tellement c’était beau. C’était un voyage dans l’extraordinaire», a déclaré l’écopédagogue Nicolas Boisclair,
L’équipe a voulu donner une voix à son documentaire en la personne du comédien Roy Dupuis, président de la Fondation Rivières. Elle a donc intercepté ce dernier lors de la descente de la Romaine, alors qu’il accompagnait un groupe chargé de faire des prélèvements du sol en bordure du cours d’eau. Le but de la descente était également de documenter l’écosystème et d’estimer les modifications qui seront faites à la Romaine.
Les dommages que subiront la faune et la flore sont indéniables. Dans son étude d’impact rendue publique, Hydro-Québec prévoit des dérangements chez les populations de caribous des bois, «une espèce ayant beaucoup de difficulté à s’adapter à la présence humaine», précise M. Boisclair. Le danger qui guette des espèces comme l’ours et la truite (qui ne peut survivre en eaux stagnantes) n’est toutefois pas mentionné dans le rapport. D’autant plus que l’échantillonnage récolté sur les berges de la rivière a démontré la présence de mercure dans le sol voué à l’inondation; lequel une fois libéré se retrouvera dans l’eau de la Romaine pour aboutir dans le Fleuve Saint-Laurent.
Du potentiel
Parallèlement à la descente en canot, le documentaire se veut aussi une enquête au sujet des autres formes de développement énergétique au Québec. Dans Chercher le courant, Roy Dupuis, accompagné des réalisateurs, nous fait découvrir le potentiel de la biomasse, du biogaz, de l’éolien, de l’énergie solaire et de la géothermie.
Il est désormais trop tard pour arrêter la construction du premier barrage, Romaine-2, étant également le plus imposant. Le comédien ne perd toutefois pas espoir qu’une autre solution existe. «Tout est encore possible, ça va dépendre de la réaction des gens», estime M. Dupuis, qui affirme que les dirigeants d’Hydro-Québec sont mal informés des possibilités de développement écoénergétique qui s’offrent au Québec. Celui-ci désigne Chercher le courant comme étant «un outil qui nous manquait».
Il croit de ce fait que «même l’argument économique d’Hydro-Québec n’est plus valable». Selon lui, la problématique repose sur le fait que l’hydroélectricité qui sera produite sur la rivière sera exportée aux États-Unis à bas prix, alors qu’ici, la facture s’avérera plus salée. C’est sans compter que le projet est estimé à au moins huit milliards et que son chantier est le plus gros du genre au Canada.
«L’écologie nous a appris qu’il faut qu’on change nos modèles de développement et on a les technologies pour le faire», reconnaît Roy Dupuis. «D’autres sources d’énergies deviennent plus profitables, en plus d’être vertes», conclut-il.