valérie désyroy
C’est l’étonnante conclusion à laquelle arrive le projet cartagène, la plus ambitieuse campagne d’échantillonnage du Québec.
Le projet cartagène, ou CARTaGENE comme l’affiche le site internet, s’est donné comme défi de constituer la plus complète des biobanque québécoise, c’est-à-dire une collection d’échantillons biologiques (p. ex. des cellules, du sang, de l’ADN) et de les associer à des données sur la santé du donneur. Le caractère de ces « banques biologiques » est donc double: elles sont à la fois une collection d’échantillons, et de données. Bien entendu, ces dernières sont codées et anonymisées afin de préserver la confidentialité absolue des donneurs. Elles sont aujourd’hui stockées à la biobanque Génome Québec à Chicoutimi.
Le projet est aujourd’hui dirigé par les Drs. Philip Awadalla (chercheur principal) Guy Rouleau (co-chercheur-principal), tous deux chercheurs au Centre Hospitalier Universitaire Sainte-Justine (CHU Sainte-Justine).
La première phase (phase A) de cet ambitieux projet a débuté en juin 2009 pour se terminer en octobre 2012, après que 20 000 québécois agés entre 40 et 69 ans aient accepté de témoigner sur leurs habitudes de vie et leur santé générale, ainsi que de fournir des échantillons de sang, de salive et d’urine. Ce groupe d’âge a été priorisé car particulièrement à risque de développer une maladie chronique dans les années à venir.
Les informations médicales recueillies sont d’une valeur scientifique très importante, puisqu’à long terme elles pourront éventuellement permettre de relier l’état de santé d’une personne à ses habitudes et son mode de vie, son environnement et son bagage génétique.
Les premiers résultats ont rapidement permis à l’équipe du Dr. Awadalla de mettre en évidence qu’une très grande partie de la population ignore souffrir de problèmes de santé chroniques répandus, tel que l’ostéoporose, l’hypertension, diverses maladies cardiaques, ou un niveau de cholestérol élevé.
De son côté, le Dr. François Madore, directeur du Centre de recherche de l’Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, a pu utiliser les données recueilllies afin d’étudier la fonction rénale des 20 000 participants. Il estime que 90% des personnes souffrant d’insuffisance rénale l’ignore, une proportion étonnante ! Il explique ce pourcentage par le fait que les premiers symptômes (fatigue, perte de poids) sont souvent attribués à d’autres maux.
Cette déficiense rénale n’est pas dangereuse en soi lorsqu’elle est modérée, néanmoins d’autres facteurs de risque tel le diabète ou l’hypertension accélérent la détérioration des reins vers l’insuffisance rénale qui, elle, peut avoir de graves conséquences, voir fatales.
… D’où l’intérêt d’un tel projet, puisqu’il permetterait à la fois d’identifier à temps les facteurs responsables du développement de certaines maladies, de permettre une meilleure compréhension de l’interaction entre nos gênes et notre environnement, et donc, d’en assurer un meilleur contrôle.
Le projet entamme sa seconde phase d’échantillonnage, qui devrait totaliser 17 000 contributions de six régions du Québec, soit Montréal, Québec, Sherbrooke, Saguenay, Trois-Rivières et Gatineau. Il n’est pas possible de se porter volontaire, pour assurer le caractère aléatoire de l’étude. Les participants -choisis au hasard par la Régie de l’assurance maladie du Québec- seront rejoints par téléphone et seront libres de participer ou non.