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La nicotine a toujours la cote – retour sur les études récentes de la consommation des produits du tabac

Je me rappelle à l’école des chandails d’éducation physique commandités par De Facto arborant les slogans la vérité sans filtre ; un environnement sans fumée ; j’arrête, j’y gagne. Je me souviens de quand on demandait à être assis dans la section non-fumeur au restaurant, bien que la fumée, elle, ne respectait pas le demi-mur qui délimitait les espaces. Plus récemment, l’interdiction de fumer sur les terrasses a également soulevé des tollés, tout comme l’instauration du neuf mètres de distance obligatoire d’une entrée pour fumer. Où en sommes-nous dans cette éternelle lutte contre la cigarette, sa nicotine et ses 7 000 substances chimiques ? Et puis la vapoteuse, sa sournoise petite sœur ?

Par Sabrina Boulanger, journaliste multimédia

Décembre 2019 – ISQ – 12-17 ans

À la fin de l’année 2019, l’Institut de statistique du Québec (ISQ) menait son enquête québécoise sur le tabac, l’alcool, la drogue et le jeu chez les élèves du secondaire (ETADJES). Ce sont ainsi 5 100 jeunes de la 1ère à la 5e secondaire qui se sont prêté.es au questionnaire. La dernière étude du genre remontant à 2013, plusieurs grands constats ont été faits : si la proportion de jeunes qui ont fumé un produit du tabac combustible dans les 30 derniers jours est passée de 12 % à 9 %, on a au contraire assisté à une explosion du vapotage. En six ans, on observe que la proportion d’adolescent.es qui ont vapoté au cours des 30 derniers jours a monté de 4 % à 21 %. Spécifiquement chez les jeunes de 5e secondaire, cette proportion monte à 35 %. (Info-tabac, 2021)

Juillet à novembre 2020 – INSPQ – 15 ans et plus

L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) avait des constats similaires lors de son enquête québécoise sur le tabac et les produits de vapotage des personnes de 15 ans et plus. Plus spécifiquement, les adolescent.es constituent le groupe qui vapote le plus – 18 % d’entre eux consommeraient, suivi par les jeunes adultes, avec 15 %. Chez les 25 ans et plus, la donnée chute à 2 %. De ces consommateur.rices, la moitié (48 %) vapotent à tous les jours. (INSPQ)

Chez les 15-24 ans, on observe que 63 % des vapoteur.euses font usage de liquides dont la concentration en nicotine est à forte teneur, c’est-à-dire qu’elle dépasse 20 mg/ml. Benoit Lasnier, conseiller scientifique dans l’équipe tabagisme à l’INSPQ et auteur principal de l’étude gouvernementale se prononce là-dessus : « C’était très préoccupant. Un produit plus fort en nicotine est plus à même de créer une dépendance et de la créer plus rapidement. » (Girard-Bossé, 2022)

Par ailleurs, le portrait des jeunes et des adultes dans l’usage de la vapoteuse est complètement différent : la majorité des adultes disent se servir de la vapoteuse dans leur démarche de réduction de consommation de tabac, tandis que la majorité des jeunes qui vapotent n’ont jamais fumé la cigarette. On note également une différence non négligeable dans la perception de la dépendance ; si 66 % des vapoteur.euses se perçoivent comme peu ou pas dépendant.e aux produits du vapotage, la proportion monte à 75 % chez les 25-24 ans. Au final, chez les 15-24 ans, on observe une prévalence de l’usage de la vapoteuse, du double usage de cigarettes traditionnelles et électronique ainsi que des produits plus concentrés en nicotine, tandis que les 25 ans et plus démontrent être plus susceptibles d’intégrer la vapoteuse dans leur quotidien et de se percevoir comme dépendant de ce produit.

Décembre 2022 – RSEQ  17-25 ans 

Pour observer spécifiquement les jeunes, le Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ) a mandaté la firme Léger d’évaluer leurs habitudes et perceptions de la consommation tabagique. La firme a ainsi sondé 510 jeunes Québécois.es de 17 à 25 ans en décembre 2022. Avec surprise, on constate que le groupe consomme pratiquement autant la cigarette que la vapoteuse. En effet, ce sont 26 % d’entre eux qui fument la cigarette au moins occasionnellement, pour 28 % qui fument occasionnellement la vapoteuse.

Si leur consommation est plutôt similaire, la perception de chacun de ces produits se distingue : les trois quarts des 17-25 ans voient comme problématique la consommation de cigarette chez leurs pairs, tandis que c’est plutôt 93% d’entre eux qui voient d’un mauvais œil la vapoteuse. C’est en outre 70% du groupe qui perçoit que le taux de tabagisme a augmenté dans les cinq dernières années.

De l’inquiétude à avoir ?

Des changements sont en cours, l’industrie du tabac n’a visiblement pas dit son dernier mot. Les arômes de menthol, de fruits ou d’autres éléments sucrés et attractifs, qui ont été interdits dans la cigarette, sont particulièrement appréciés dans les liquides de la vapoteuse et représentent l’écrasante majorité des choix des jeunes. Les adeptes de la vapoteuse ne sont plus seulement les gens qui désirent cesser de fumer, ce pourquoi la cigarette électronique avait initialement été commercialisée. Il y a une recrudescence du tabagisme chez les jeunes. Les lois n’encadrent pas aussi bien l’usage de la cigarette électronique que la cigarette conventionnelle, de la commercialisation à la gestion des déchets. La vapoteuse a la cote auprès des adolescent.es et de manière générale, les jeunes estiment que le risque pour la santé associé au vapotage avec nicotine est moindre que celui lié à la cigarette. (INSPQ, 2022) Bref, il y a de quoi s’inquiéter de ce portrait mouvant dans le temps.

L’enquête de l’INSPQ de 2020 est la première à faire une enquête transversale sur les produits du vapotage, sur les personnes de 15 ans et plus – l’institut prévoit relancer une nouvelle édition en 2023, afin d’étayer le portrait de la consommation et d’évaluer la progression du tabagisme. 

Pour n’évoquer que quelques conséquences négatives au tabagisme, mentionnons : 

  • ce sont 13 000 Québécois.es qui décèdent annuellement en raison du tabac (Cision Canada, 2023) ;
  • les coûts qui sont associés au tabagisme, uniquement en termes de santé, s’élèvent à 3,8 milliards de dollars par année au Québec (Cision Canada, 2023) ; 
  • la culture, la production, le transport, la commercialisation et consommation et la post-consommation des produits du tabac ont d’importantes retombées néfastes sur l’environnement ;
  • la culture du tabac entraîne la déforestation, impactant la biodiversité et déviant l’usage de terres pour l’agriculture humaine (Québec sans tabac) ;
  • L’eau et les sols sont grandement contaminés par les mégots de cigarette.

Il existe de nombreuses ressources pour réduire et arrêter de fumer. J’ARRÊTE est l’un de ces programmes.

 

Références

Cision Canada. (2023, 8 février). Le gouvernement annonce une nouvelle mesure de santé publique pour lutter contre le tabagisme. https://www.newswire.ca/fr/news-releases/le-gouvernement-annonce-une-nouvelle-mesure-de-sante-publique-pour-lutter-contre-le-tabagisme-810325562.html

Girard-Bossé, A. (2022, 25 octobre). Près d’un adolescent sur cinq vapote. La Presse. https://www.lapresse.ca/actualites/2022-10-25/enquete-de-l-inspq/pres-d-un-adolescent-sur-cinq-vapote.php

Info-tabac. (2021, juin). Les nouveaux visages de la nicotine. https://info-tabac.ca/les-nouveaux-visages-de-la-nicotine/

Institut national de la santé publique. (2022, octobre). Le vapotage chez les Québécois : données de l’Enquête québécoise sur le tabac et les produits de vapotage 2020. https://www.inspq.qc.ca/sites/default/files/publications/3247-vapotage-quebecois-2020.pdf

Québec sans tabac. (s.d.). Fumer détériore l’environnement. https://www.quebecsanstabac.ca/je-minforme/consequences-societe/tabac-impacts-environnement



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