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Les généalogistes successoraux un métier peu connu

Il y a quelques années, les courriels promettant à des internautes des sommes mirobolantes qui provenaient d’héritages de princes africains étaient assez populaires. Évidemment, il s’agissait d’arnaques montées de toutes pièces par des escrocs désirant mettre la main sur les renseignements personnels ou sur l’argent des crédules prêts à marcher dans ces stratagèmes. Or, certaines personnes recherchent vraiment les héritiers de personnes décédées dans le but de leur remettre un héritage. Ce sont les généalogistes successoraux.

Par Émile Lupien-Bérubé, journaliste multimédia

La chasse aux héritiers

« On nous appelle aussi des chercheurs d’héritiers. On fait appel à nous lorsqu’une personne décède et que ses héritiers ne sont pas connus ou pas localisables. À ce moment, le notaire ou le liquidateur [de succession] nous appelle en nous disant qu’ils recherchent telle personne », explique le généalogiste successoral Christophe Savary.

Un cheminement atypique

L’étude de M. Savary a pignon sur rue à Trois-Rivières depuis 1999 et il pratique la profession depuis le début des années 1990. Il l’avoue, c’est un peu de façon fortuite qu’il s’est retrouvé à pratiquer ce métier. « Je suis tombé dedans par hasard. En fait, à la suite de mon service militaire en Allemagne, j’ai répondu à une annonce. J’ai été pris sur 1500 personnes à l’époque, j’ai été engagé et j’ai commencé comme ça », raconte celui qui a préalablement suivi des études en gestion.

Si certains établissements en France proposent des formations en généalogie successorale, ce n’est pas encore le cas au Canada, ce qui explique le faible nombre de chercheurs d’héritiers au pays, avance M. Savary.

Sur les traces des successeurs

La première étape de la recherche d’héritiers consiste à tenter de dresser un arbre généalogique de la famille du défunt, indique M. Savary. Pour ce faire, il utilise des bases de données publiques et restreintes, des documents civils et des témoignages familiaux. Vient ensuite la localisation des héritiers, qui peut être plus complexe, et que le généalogiste qualifie du début du « travail de détective ».

S’ils ne constituent pas la panacée, les réseaux sociaux peuvent s’avérer être utiles. Ils peuvent aider les généalogistes, par exemple lorsqu’une photographie géolocalisée annonçant l’achat d’une nouvelle maison est publiée. « Ce n’est pas parce qu’ils sont sur les réseaux sociaux qu’ils vont répondre aux messages que vous envoyez, explique toutefois M. Savary. Ça confirme surtout que vous êtes sur la bonne piste. Ça permet d’avoir des noms ou des lieux. »

Le généalogiste précise qu’il est assez rare qu’il ne parvienne pas à localiser d’héritiers, affirmant avoir un taux de succès approximant les 98 %. Certaines situations peuvent toutefois lui compliquer la tâche : « Ça va arriver certaines fois quand ce sont des sans-abri. C’est plus complexe parce qu’il n’y a pas vraiment d’organisme [qui collige des données sur les sans-abri]. Ça peut arriver, mais c’est assez rare, même dans les pays étrangers, on arrive à retrouver les gens. »

De quelques semaines à plusieurs années

Le temps accordé à chacun des mandats de M. Savary varie en fonction de chaque dossier. « Si on m’appelle pour me dire qu’il manque un héritier […] ça peut nous prendre [quelques semaines] à le retrouver. Une fois qu’on l’a retrouvé, on donne les coordonnées au notaire, qui n’a pas grand-chose à finaliser par la suite. S’il n’y a pas de vente de biens à conclure ou quoi que ce soit, ça peut se terminer relativement vite, en quelques mois », expliquet-il.

Les dossiers les plus longs à régler sont souvent ceux qui impliquent des biens immobiliers ou des héritiers à l’étranger et peuvent prendre des années avant d’être bouclés. M. Savary mentionne comme exemple une affaire sur laquelle il travaille depuis dix ans.

Pas d’obligation de payer

M. Savary tient à préciser que même si son emploi implique aussi l’accompagnement des héritiers, aucune somme n’est réclamée à ceux-ci au cours de leur collaboration. « On ne demande jamais d’argent aux héritiers en disant “il faudrait que vous payiez pour faire avancer le dossier plus vite”. On avance tout, et si jamais la succession s’avère déficitaire, on garde les frais pour nous. Les héritiers n’ont jamais rien à débourser ou avancer», explique-t-il.

C’est par courriel ou par téléphone que M. Savary contacte généralement les héritiers, qui mandatent habituellement leurs avocats afin de prendre contact avec l’étude du généalogiste. On est donc bien loin du modus operandi des escrocs du web, qui sévissent essentiellement par courriel.

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