Le gouvernement québécois a annoncé en début de semaine dernière d’importantes restrictions budgétaires qui s’élèvent à environ 172 millions de dollars, indiquant aux universités québécoises la nécessité de se serrer la ceinture. L’Université Laval, quant à elle, voit son budget comprimé de 48 millions de dollars pour l’année 2014-2015.
Des restrictions historiques : c’est le consensus qui semble émaner du milieu universitaire à la suite du dévoilement, par le gouvernement de Philippe Couillard, de nouvelles compressions budgétaires imposées aux universités. Le monde universitaire crie au scandale.
La Confédération des associations d’étudiants et étudiantes de l’Université Laval (CADEUL) ainsi que l’Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures (ÆLIÉS) déplorent le manque de concertation du gouvernement libéral sur ce sujet. Selon eux, le gouvernement aurait pu consulter davantage les associations étudiantes. Pour la CADEUL et l’ÆLIÉS, c’est « mettre la charrue avant les bœufs », dans la mesure où le budget des universités avait déjà été établi depuis le mois de mai dernier.
Selon la présidente de la CADEUL, Caroline Aubry, réduire autant le budget des universités paraît très ardu et cela nuira, très probablement, à la qualité de l’enseignement de l’Université Laval, bien que « la priorité de Laval [soit] d’assurer la qualité de la formation », nuance-t-elle.
C’est dans cette optique que le président de l’ÆLIÉS, Christian Djoko, insiste sur le fait que ces compressions sont « démagogiques », dans le sens où « il faut prendre soin de l’éducation qui est un bien commun qui doit être profitable à la société ». Il serait, alors, contraire à ces principes de la fragiliser. M. Djoko en vient à s’interroger sur « la place que nous voulons de l’éducation dans la société », puisque le gouvernement ne semble pas accorder une place première à l’éducation, qui est pourtant, pour lui, primordiale dans chaque société.
Le président de l’ÆLIÉS émet un léger rapprochement entre les événements de 2012, autrement dit le refus de la hausse des frais de scolarité et ces restrictions budgétaires. Selon lui, il s’agit de « faire entrer par la fenêtre ce qu’on a expulsé par la porte ».
Des compressions nécessaires ?
Bernard Beaudreau, professeur au Département d’économie de l’Université Laval et spécialiste en économie publique, explique que ces compressions budgétaires sont nécessaires au niveau macroéconomique. « Les deux ministères les plus importants [en ce qui concerne les] coûts sont la Santé et l’Éducation, donc on doit couper entre les deux. Or on sait que politiquement parlant c’est plus facile de couper dans le système éducatif que dans le système de la santé [car] c’est moins sujet à scandale », explique-t-il.
Il souligne, par ailleurs, que le gouvernement « n’a pas le choix », même si « tout le monde croit que la forme d’éducation est vraiment importante en terme de croissance économique d’un État. Mais le problème, c’est qu’on a beau avoir toutes les attentes, on a pas les moyens de nos objectifs. »
Jusqu’à maintenant, il paraît difficile de savoir ce qui sera coupé en premier. D’ailleurs, dans un article du Soleil du 15 septembre dernier, le vice-recteur de l’Université Laval, Éric Bauce, indique lui-même qu’il est trop tôt pour le savoir. Cependant, il sera très probable qu’il y ait une diminution des cours à option, des emplois (entre autres les auxiliaires), des heures d’ouverture du PEPS et de la Bibliothèque, de même des coupures dans les bourses ainsi que dans le matériel de laboratoire et les livres de la Bibliothèque.
Solutions
La CADEUL et l’ÆLIÉS se déclarent toutes deux « en mode solution », tout en affirmant fermement réagir à ces restrictions. En regard d’une telle somme, il paraît complexe de faire des miracles. Contrairement au gouvernement, les deux associations voient d’autres solutions davantage alternatives. Christian Djoko assure qu’elles se battront « avec force et acharnement pour la promotion et la défense des droits des étudiants et étudiantes. » De plus, il précise que ce combat ne se passera pas seulement au niveau local, mais aussi provincial. Néanmoins, il s’agit tout d’abord de procéder à des discussions, d’échanger et de tenter de trouver des solutions avec les autres associations.
La présidente de la CADEUL déclare que son association se positionne depuis 2010-2011 en faveur du Fonds de service de santé et de l’éducation post-secondaire (FSSEP). Selon elle, ce fonds ne « demande ni plus d’argent au gouvernement ni plus d’argent aux étudiants, mais aux entreprises. Ainsi, cette mesure permettrait, alors, d’éviter ce genre de coupures, bien qu’elle demeure sujette à réflexion. »
De même, l’ÆLIÉS encourage depuis 2012 une mesure visant à « introduire une taxe sur la masse salariale des entreprises et des organismes afin de financer le réseau universitaire. »
Bernard Beaudreau semble, quant à lui, souhaiter plus de réalisme. « Nous n’avons pas les sous, alors il faut être raisonnable », déclare-t-il. À défaut de ne pas augmenter les impôts, de ne pas s’endetter, ainsi que de ne pas accroître les frais de scolarité, il ne resterait qu’à couper », explique-t-il. Il promeut cependant plus de concertation entre les recteurs et le gouvernement.
Néanmoins, M. Beaudreau paraît optimiste en affirmant que « c’est peut-être passager ». Autrement dit, le gouvernement coupe maintenant, mais si l’économie va mieux, on réinvestira et on augmentera de nouveau les budgets.
Contactée à ce sujet, l’Université Laval n’a pas souhaité répondre à nos questions.