L\’astronomie voit grand

Lorsqu’on veut fabriquer un nouvel instrument astronomique, mieux vaut s’y prendre à l’avance. Plus le télescope est gros, plus les coûts seront évidemment élevés et plus il sera long à construire. Souvent, on parle davantage en termes de décennies qu’en termes d’années avant la «première lumière» – expression utilisée par les astronomes pour parler de la première observation effectuée avec un nouvel instrument.

Les deux projets placés au sommet de la liste des recommandations du comité dirigé par Roger Blandford de l’Université Stanford ont en commun d’être des instruments dits de «survey», un terme technique qui pourrait se traduire par «instrument de repérage». Avec ce type d’instruments, on mise généralement davantage sur la quantité des données collectées que sur leur qualité. Les télescopes fréquemment utilisés sont ceux de moyenne envergure et peuvent observer une grande partie du ciel en peu de temps. Le partage des données recueillies s’effectue ensuite par le biais d’Internet afin qu’elles soient utilisées par les astronomes dans plusieurs programmes de recherche. Par contre, dans la présente liste de suggestions, les deux principaux télescopes recommandés sont loin d’être de modeste envergure. Leur valeur est chiffrée à près de deux milliards de dollars.  

Sus à l’énergie sombre
Selon ce qu’on peut lire dans le rapport du comité, le premier projet envisagé, soit le WFIRST (Wide Field InfraRed Survey Telescope), sera un télescope spatial qui servira principalement à détecter des planètes extrasolaires – sujet très à la mode par les temps qui courent. L’instrument servira par ailleurs surtout à étudier cette fameuse énergie sombre qui échappe encore à la compréhension des astronomes. L’énergie sombre, qu’on peut aussi appeler «constante cosmologique», serait l’énergie permettant à l’Univers d’être non seulement en expansion, mais qui permettrait aussi à cette expansion d’aller en s’accélérant. La date de lancement du télescope est prévue autour de l’année 2020, à condition que l’économie américaine
soit prospère.

Le deuxième projet, tout aussi ambitieux, est un télescope plus «conventionnel» qui sera situé au sommet du Cerro Pachon, en plein cœur de la Cordillère des Andes, au Chili. Surnommé le LSST (Large Synoptic Survey Telescope), ce télescope dont le miroir principal aura un diamètre de 8,4 mètres pourra couvrir l’ensemble du ciel en seulement trois nuits. La caméra utilisée pour ce télescope équivaut à un appareil photo numérique de 3.2 gigapixels, soit ce qui se fait de plus grand au monde. Laurent Drissen, astronome et professeur titulaire au département de physique, de génie physique et d’optique de l’Université Laval, explique que le principal défi relié à ce télescope n’est pas de le construire, mais bien de gérer les données pouvant être produites par cet outil. En effet, la caméra produira une quantité faramineuse de 30 téraoctets de données par jour! Le télescope servira particulièrement à trouver des objets à luminosité ou à position variables comme des supernovae, ou même des astéroïdes qui se dirigent vers la Terre.

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