Le Burundi est en proie à une crise politique. Afin de comprendre les enjeux et l’impact de cette crise sur la vie des Burundais, l’association étudiante parascolaire AKIWACU a organisé une conférence à l’Université Laval vendredi soir dernier.
Dans les dernières années, le gouvernement burundais ne fait pas bonne figure. Il est accusé de réprimer les opposants au régime. Le 26 avril 2015, le président Pierre Nkurunziza a déclaré vouloir briguer un troisième mandat, soulevant ainsi un tollé au sein d’une partie de la population.
Beaucoup tentent de manifester tant bien que mal, mais font face à une politique très répressive. Les protestations sont désormais interdites. Elles sont d’ailleurs considérées comme une insurrection.
Après une tentative de coup d’État raté en mai, les mesures deviennent beaucoup plus drastiques envers les opposants. La torture, les traitements inhumains, les emprisonnements sans procès, les assassinats politiques et les enlèvements sont de mises pour les dissiper.
Pierre Nkurunziza sort tout de même vainqueur des élections en juillet. Il est déclaré officiellement Président pendant le mois d’août.
Une crise électorale
« En Afrique, les élections suscitent toujours la peur », rappelle Émile Ouédraogo, l’un des conférenciers. Selon lui, la mauvaise gestion du processus électoral débouche sur des violences. Le Burundi n’en est qu’un exemple parmi tant d’autres.
Émile Ouédraogo met également en exergue la consécration d’un pouvoir à vie. Il y a une tentative de la part du gouvernement de déguiser son but premier en le noyant dans des notions juridiques. Or, « la légitimité, c’est la conformité de la conscience du monde. Lorsque le peuple dit non, il faut pouvoir la suivre », argue-t-il en citant Robert Dossou.
L’interprétation subjective des règles électorales est également à ajouter au tableau. Émile Ouédraogo le souligne bien : « On essaye d’interpréter les règles constitutionnelles de manière à ce qu’elles correspondent à ce que l’on veut, dans le sens qui nous arrange ».
Une nouvelle guerre civile ?
À travers un témoignage très poignant, Marguerite Barankitse, « la maman nationale » du Burundi profite de cette conférence pour donner un message d’espoir. « Je viens vous dire que la haine n’aura jamais le dernier mot », explique-t-elle.
Sa lutte pour former une nouvelle génération de Burundais qui ne prendrait pas en compte les ethnies est mise à mal par cette situation politique. L’équilibre si difficilement obtenu est sur le bord de rompre.
L’International Crisis Group place d’ailleurs le Burundi en « état d’alerte de conflit ». Le flot continu de réfugiés fuyant vers les pays voisins (RD Congo, Rwanda et Tanzanie) et l’escalade de la violence laisse présager une nouvelle guerre civile. Un étudiant burundais présent nous confie d’ailleurs que « mon père est encore sur place, il ne dort presque plus ».
Toutefois, « Maggy », préfère penser que ce qui fait « la grandeur de l’Homme, c’est qu’il est capable de se remettre en question et revenir dans le droit chemin ».
Depuis son indépendance en 1962, l’instabilité liée à la mauvaise gouvernance est monnaie courante au Burundi. Comme au Rwanda, le climat de conflit ethnique règne dans cette région du monde.
Ceci n’augure rien de bon pour les Burundais divisés entre Tutsis et Hutus. À la suite de l’assassinat du Président, la guerre civile éclate finalement en 1993. Ce conflit aura fait plus de 300 000 morts jusqu’en 2006.
Les accords de paix d’Arusha, connu pour avoir été sous l’égide de Nelson Mandela, seront signés fin août 2000. Ces derniers auront inspiré la nouvelle constitution de 2005.
Celle-ci ne permet pas au Président en place de se présenter plus de deux fois. C’est ici que se situe le nœud du problème et le Burundi n’est pas une exception sur le continent.